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Medievalista

versão On-line ISSN 1646-740X

Medievalista  no.36 Lisboa dez. 2024  Epub 30-Set-2024

https://doi.org/10.4000/medievalista.8337 

Dossier

Une diplomatie sur le temps long: les princes héritiers aragonais dans les négociations de mariage anglo-aragonais (1273-1291)

Diplomacy over time: the role of the Aragonese Crown Princes in the Anglo-Aragonese marriage negotiations from 1273 to 1291

Zoe Plaza Leroux1 

1 Sorbonne Université, 75005 Paris, France; zplazaleroux@gmail.com


Résumé

Les recherches sur les négociations matrimoniales ont eu tendance à présenter les princes héritiers comme de simples objets de négociation dans les affaires diplomatiques. Cette perspective mérite d’être nuancée à la lumière du projet de mariage anglo-aragonais conduit sur la période 1268-1285. En effet, Pierre d’Aragon suivi de son fils Alphonse sont des acteurs centraux dans ces négociations. L'article étudie le rôle actif que certains héritiers royaux peuvent jouer dans le domaine de la diplomatie. Cette fonction se développe en parallèle de l’établissement du principe de succession dans la Couronne d’Aragon au XIIIe siècle qui transforme la figure du prince héritier en une incarnation du futur de la dynastie. Sa participation aux affaires diplomatiques permet dès lors de le préparer à son futur rôle de roi, mais également d’envisager les actions diplomatiques dans le temps long de la dynastie, au-delà de la simple durée d’un règne.

Mots clés: diplomatie; prince héritier; mariage; Couronne d’Aragon; Angleterre

Abstract

The study of matrimonial negotiations previously characterised by the perception of the Crown Princes as mere objects of negotiation in diplomatic affairs, reveals a different perspective in the light of the Anglo-Aragonese marriage project of 1268-1285. Peter of Aragon and his son Alfonso were indeed central players in these negotiations. The article explores the active role that certain royal heirs play in diplomatic affairs. This new role accompanied the establishment of the principle of succession in the Crown of Aragon in the 13th century, which transformed the figure of the crown prince into an embodiment of the future of the dynasty. His involvement in diplomatic affairs thus enables him to prepare for his future role as king, but also to consider diplomatic actions in the long term of the dynasty, beyond the mere duration of a reign.

Keywords: diplomacy; crown prince; marriage; Crown of Aragon; England

Si l’étude des négociations matrimoniales a longtemps fait des princes héritiers de simples objets de la négociation diplomatique, le cas du projet de mariage anglo-aragonais des années 1268 à 1291 montre que Pierre d’Aragon, futur Pierre III (1276-1285), puis son fils Alphonse, futur Alphonse III (1285-1291), en sont des acteurs à part entière1. Notre étude s’étendra jusqu’à l’année 1285, en raison de l’accession au trône d’Alphonse et de son changement de statut à cette date. Il est toutefois à noter que les négociations autour de ce projet de mariage se poursuivent jusqu’en 1291.

Bien que ce projet matrimonial n’ait jamais fait l’objet d’une analyse approfondie, les deux princes héritiers ne sont pas inconnus de l’historiographie. La vie du prince Pierre est bien documentée grâce aux travaux de Ferran Soldevila et de Stefano Maria Cingolani2. Le prince Alphonse a pour sa part fait l'objet d'une étude de Ludwig Klüpfel en 1911. Plus récemment, Francisco Saulo Rodríguez Lajusticia a souligné les liens importants qu'il entretenait avec la maison Plantagenêt3. Cependant, ces deux études se sont principalement focalisées sur le règne d'Alphonse, laissant de côté la période au cours de laquelle il est prince héritier (1265-1285).

Cette période mérite pourtant d’être envisagée avec attention. Les princes héritiers sont destinés à régner. Leur instruction comprend alors non seulement une formation militaire, mais aussi une formation politique. Dans ce cadre et pour les préparer à leur futur métier de roi, les princes héritiers peuvent se voir confier des missions diplomatiques. Celles-ci servent généralement les intérêts politiques du roi.

Au moins huit pièces éclairent l’action diplomatique des deux princes héritiers et leurs relations avec la famille royale anglaise4. Les registres de la comptabilité personnelle de l’infant Pierre font apparaître quatre messagers anglais payés par cet infant entre les années 1268 et 12695. L’on dispose également d’un pacte de mariage de 1273 entre Edouard Ier d’Angleterre (1272-1303), pour sa fille aînée et le fils aîné de l’infant Pierre d’Aragon6. Trois lettres, l’une de créance envoyée au roi d’Angleterre pour traiter du mariage, les deux autres datant des années 1274-1277, sont échangées entre ces deux personnages pour prendre des nouvelles de leur santé respective7. Le rôle d’Alphonse est pour sa part documenté par deux lettres échangées avec la famille royale anglaise dans les années 12808. La pièce la plus remarquable et qui retiendra plus particulièrement l’attention ici est le traité de 1273.

Ce projet, loin d’être un hapax, s’inscrit dans un ensemble plus vaste de relations diplomatiques entre le royaume d’Angleterre et la Couronne d’Aragon. Il constitue néanmoins un point de bascule significatif, et donc un observatoire précieux pour tenter de saisir la nature de l’action diplomatique entreprise par le prince héritier Pierre. Ce dernier possède un degré d’autonomie remarquable9. C’est donc sur lui que portera plus particulièrement cette étude.

Le contexte des relations anglo-aragonaises

L’action diplomatique de Pierre d’Aragon dans le cadre de ce projet de mariage constitue un élément d'un ensemble plus vaste de relations diplomatiques anglo-aragonaises, entre la dynastie des Plantagenêts et la maison d’Aragon. Ces relations remontent au moins à la fin du XIIe siècle. Le projet s’inscrit donc dans un temps long et constitue un type d’alliance héréditaire10, renouvelée à chaque changement de génération.

Dès les années 1170 et alors que les comtes de Barcelone et les ducs d’Aquitaine sont en conflit avec les comtes de Toulouse dans la grande guerre méridionale, Henri II d’Angleterre (1154-1189), duc d’Aquitaine, et Raimond-Bérenger IV de Barcelone (1131-1162) décident de s’allier11. Cette politique d’alliance est poursuivie par Richard Ier d’Angleterre dit Cœur de Lion12.

Sous les règnes de Jacques Ier d’Aragon (1213-1276) et Henri III d’Angleterre (1216-1272), les échanges continuent et s’intensifient. En 1236, le Plantagenêt épouse Éléanore de Provence, descendante d’Alphonse II d’Aragon (1162-1196) par son père. Les enfants du couple ont donc des liens de parenté avec la maison d’Aragon.

Dans les années 1240, l’envoi de plusieurs messagers entre les deux rois témoigne de la poursuite des relations diplomatiques13. La teneur exacte de ces échanges est toutefois inconnue. Ces liens s’étaient-ils formés à cause de leur colère commune face au mariage de Charles d’Anjou et de Béatrice de Provence en 1245 ? En effet, à la mort d’un comte de Provence sans héritier mâle, il était coutume que le comté revienne aux mains des souverains de la Couronne d’Aragon. Ainsi avait-on procédé en 1166 à la mort de Raimond-Bérenger III de Provence (1144-1166) puis en 1196 à la mort de Raimond- Bérenger IV (1152-1196). Le comté était alors revenu à Alphonse II d’Aragon. Or, à la mort de Raimond- Bérenger V en 1245, ce dernier avait laissé le comté à la plus jeune de ses filles, Béatrice. Si celle-ci n’avait pas d’héritier mâle, le comté devait alors passer à sa sœur Sancie, femme de Richard de Cornouailles. Si les deux femmes mouraient sans héritier, alors le roi d’Aragon récupèrerait la Provence. L’Angleterre et la Couronne d’Aragon avaient donc des ambitions sur le comté de Provence. Mais Louis IX de France (1226-1270) fut plus rapide et maria Béatrice à son frère Charles d’Anjou. Jacques Iᵉʳ et Henri III avaient donc des griefs communs envers le roi de France. Ces événements contribuèrent sans doute au développement des échanges entre les deux cours.

Ces échanges deviennent plus importants dans les années 1250. Ainsi un premier projet de mariage voit-il le jour en 1253. Concernant le prince Pierre14, ce projet ne se concrétise pas, mais entretient les échanges, qui se poursuivent tout du long des années 125015. Les deux dynasties maintiennent donc des liens depuis presque un siècle lorsque les négociations entre Edouard Ier d’Angleterre et l’infant Pierre débutent. Ces échanges sont jusqu’ici systématiquement le fait des rois à la tête de chaque dynastie. L’action diplomatique de Pierre marque à cet égard un tournant.

Le tournant du projet de mariage de 1273

En octobre 1273, Édouard Ier roi d’Angleterre et Pierre, prince héritier de la Couronne d’Aragon, signent un pacte de mariage par lequel ils entendent fiancer leurs enfants. Ce traité est un chirographe dont deux exemplaires sont conservés ; l’un aux National Archives à Londres, l’autre à l’Archivo de la Corona de Aragón, à Barcelone16.

Les raisons qui animent ce projet sont explicitées dans le document même:

“Le seigneur Édouard, par la grâce de Dieu illustre roi d’Angleterre, seigneur d’Irlande et duc d’Aquitaine, et l’illustre infant Pierre, aîné et héritier du magnifique roi d’Aragon, voulant fermement établir entre eux un amour et une concorde véritables, fermes et durables, et les renforcer par un lien de parenté, s’accordèrent ainsi : ledit seigneur roi d’Angleterre fiancerait sa fille et celle de l’illustre reine la dame Aliénor, son épouse, au fils aîné dudit seigneur infant et de l’illustre dame Constance, sa femme”17.

Les mariages sont en effet l’un des principaux outils à la disposition des princes lorsqu’ils cherchent à entrer en alliance avec un autre prince. Ces alliances se fondent sur l’amicitia, vertu fondamentale à la base de tout pacte au Moyen Âge qui a valeur de lien quasi-juridique. Les liens de parenté étant le moyen le plus efficace de créer cette amicitia, ces deux hommes cherchant à créer un “amour et une concorde” choisissent donc tout naturellement de s’unir par ces liens18.

Fait remarquable : l’un est roi, l’autre est prince héritier. Dans le cadre des négociations pour les mariages dynastiques, ces derniers sont généralement considérés comme des objets de la tractation et en sont très rarement les acteurs. Un mariage princier est censé créer une union entre les deux dynasties qu’il unit et leurs territoires. C’est cela même qui est évoqué par le pacte lorsqu’il est question d’une “concorde véritable et durable”. Durable car elle sert à créer un lien qui doit survivre à ces deux princes. Ces affaires, d’une importance capitale pour l’avenir de la dynastie, sont de ce fait en général traitées par les rois. On aurait donc pu s’attendre à ce que soit le roi Jacques Ier d’Aragon, le père de Pierre, qui mène la négociation pour son fils. Or c’est l’héritier, Pierre, qui s’en charge. Le prince héritier s'avère donc être un acteur majeur dans les relations diplomatiques.

Le document d’octobre 1273 est la première mention d’un projet visant à fiancer la fille du roi d’Angleterre et le fils aîné de l’infant Pierre19. Cette alliance matrimoniale est très sérieuse car il ne s’agit pas ici uniquement de s’accorder sur un futur projet, mais, déjà, d’organiser les fiançailles. Le pacte indique en effet que “Ledit seigneur roi […] fiança par promesse de mariage sa fille au fils dudit seigneur infant, et celui-ci, de la même manière, fiança son fils à la fille dudit seigneur roi”20. L’indication per verba de futuro nous renseigne sur la nature même de cette promesse. Les fiançailles pourraient en théorie être rompues contrairement aux fiançailles per verba de presenti. Toutefois, les fiançailles per verba de futuro représentent un engagement public et obligent les parties à garder leur promesse. À partir de cette étape, il est donc très difficile de rompre le contrat21. Il se peut donc qu’Édouard Ier et l’infant Pierre aient voulu s’assurer de la conclusion de ce projet en fiançant leurs enfants assez rapidement.

L’absence de Jacques Ier dans ce document à l’importance tant symbolique que concrète est troublante. Le roi d’Aragon apparaît mais seulement en creux. La mention de “Roi d’Aragon” a en effet pour seule utilité de qualifier le statut de Pierre en tant que “prince héritier”. Le prince agit seul. D’autres documents antérieurs, qui nous renseignent sur la pratique diplomatique de l’infant, mentionnent cependant que Pierre agit sous tutelle du roi d’Aragon et avec sa volonté. C’est notamment le cas pour les négociations de son propre mariage avec Constance de Hohenstaufen22.

Pierre aurait-il pu agir de façon autonome parce qu'il est question du mariage de son propre fils? La puissance paternelle joue certainement un rôle ici, mais elle n’explique pas tout. En tant que père, Pierre exerce une autorité sur son fils et a donc le droit de traiter de son mariage. Cependant, en tant que prince héritier il doit s’inscrire dans le sillage de son père. Le cas du roi de France Philippe Auguste sert d’ailleurs de contre-exemple. En 1214 ce dernier se charge de fiancer son petit-fils Philippe de France et promet même de le remplacer par son petit frère Louis, futur Saint Louis, si le premier venait à mourir23. Le roi de France traite donc ici du mariage de ses petits-enfants. Jacques Ier d’Aragon aurait donc pu traiter directement avec Edouard du mariage. De même, s’il n’avait pas participé aux négociations son accord aurait pu apparaître dans le document. Le fait que Pierre agisse seul, sans mention de son père, est donc inhabituel. Comment l’expliquer ?

Interprétations et enjeux

Un contexte favorable à l’alliance et à la prise d’autonomie

Deux contextes peuvent éclairer l’action du prince héritier et ce qui apparaît comme une prise d’autonomie vis-à-vis de son père : premièrement celui des ambitions politiques de Pierre et d’Edouard Ier au début des années 1270, deuxièmement celui familial de 1273.

Si cette alliance matrimoniale s’inscrit dans le domaine de relations habituelles entre les deux dynasties, le contexte politique des années 1270 est favorable au rapprochement des deux hommes. Edouard Ier vient de monter sur le trône et cherche à maintenir la paix aux frontières de l’Aquitaine, dans une période de troubles pour le duché24. Ce mariage fait alors partie d’un projet plus vaste d’alliances outre-pyrénéennes25. Dans le cas de l’Aragon, l’enjeu est de trouver un allié face aux Capétiens, peut-être même pour Pierre un allié face à Charles d’Anjou26. Les deux princes pourraient donc être à l’origine du projet. La proposition d’alliance matrimoniale de 1253 avait été initiée par la partie anglaise, et c’est peut-être à nouveau le cas ici, bien que la documentation ne permette pas d’éclaircir ce point.

La prise d’autonomie diplomatique du prince héritier peut également être éclairée par la situation familiale de la maison d’Aragon en 1273. Au moment même de la signature de ce pacte de mariage, l’infant et son père ne sont pas en bons termes. Pierre s’oppose à son frère bâtard qu’il accuse d’avoir essayé de le détrôner et de l’assassiner27. Ceci peut expliquer qu’il n’ait pas demandé le consentement de son père. Il convient toutefois de souligner que cette action diplomatique ne semble pas être elle-même un acte d’opposition.

Ce double contexte favorise donc l’alliance entre ces deux royaumes mais aussi une prise d’autonomie diplomatique du prince héritier. Il convient cependant s’interroger sur le degré d'indépendance de Pierre.

Un infant autonome dans les relations diplomatiques avec l’Angleterre?

L’action diplomatique du prince héritier Pierre d’Aragon est-elle donc uniquement de son fait ? Existe-t-elle en parallèle d’une action menée par son père ? Lui a-t-on laissé un monopole des relations avec l’autre prince héritier, Édouard ? Parce qu’il semble y avoir une volonté de construire des relations d’amitié sur le long terme avec la dynastie Plantagenêt, il existe peut-être la volonté de créer un lien entre ces deux princes héritiers, futurs rois respectifs de leurs royaumes. La nature de l’action diplomatique de Pierre mérite à ce titre d’être examinée plus en détail.

La première trace d’une intervention de Pierre dans les relations diplomatiques avec la famille royale anglaise date de 1268. Les registres de l’infant Pierre conservés à l’Archivo de la Corona de Aragón révèlent ainsi deux messagers (troters), d’Henri (Henri III) et Edouard, dont les services sont réglés sur les dépenses de l’infant28. Il en est de même en 1269 pour deux messagers arrivés à Barcelone de la part d’Henri III et d’une deuxième personne dont le nom est effacé, probablement Edouard29. Ces deux messagers doivent repartir à Burgos, où va être célébré le mariage de Ferdinand de la Cerda, fils d’Alphonse X roi de Castille. C’est à nouveau l’infant qui se charge des dépenses.

Les messagers doivent se rendre à Burgos car le prince Edouard s’y trouve très probablement. La Crónica de Alfonso X indique qu’un certain Edouard prince d’Angleterre a assisté à ce mariage. On peut supposer qu’il s’agit du futur Edouard Ier30. Le Libre dels feits indique pour sa part qu’à ce mariage, outre Edouard, se trouve également le roi d’Aragon31. Si la documentation ne permet pas de savoir si Jacques Ier d’Aragon et celui qui était alors prince héritier du royaume d’Angleterre se sont entretenus à cette occasion, il reste possible que des discussions aient eu lieu entre les deux hommes dans ce cadre.

Il est impossible de connaître le contenu exact de ces échanges de messagers. Le manque de sources invite à la prudence. Toutefois, une pastourelle composée par le troubadour provençal Paulet de Marseille dans les années 1265-1266 permet d’avancer certaines hypothèses. L’autrier m’anav’ab cor pensiu évoque déjà une possible alliance entre le prince Édouard et l’infant Pierre d’Aragon. L’auteur exprime en effet son désir de voir un amour grandir entre ces deux infants32. Si Paulet de Marseille exprime cela dans le cadre d’une possible alliance visant à reconquérir le comté de Provence, il se pourrait que la pastourelle soit aussi un écho de négociations ou de discussions ayant eu lieu à la cour de Jacques Ier d’Aragon33. Le projet de mariage, dont il ne demeure de trace concrète que pour 1273, pourrait donc avoir été discuté dès la deuxième moitié des années 1260. Ces quelques fragments ne permettent cependant pas d’affirmer la formation d’un tel projet. L’infant Pierre commence pour autant dès la fin des années 1260 à s’impliquer dans les relations diplomatiques avec la dynastie Plantagenêt, sans qu’il soit possible de déterminer si cette action s’inscrit ou non dans la continuité de celle de son père.

Après 1273, le prince héritier Pierre continue à agir de manière apparemment autonome dans sa relation avec le roi d’Angleterre. En avril 1275, il envoie en effet une lettre de créance à Edouard pour l’informer de l’arrivée prochaine d’un messager. Ce dernier devait alors traiter du mariage déjà convenu entre son fils aîné Alphonse et la fille aînée d’Édouard, mais il devait également proposer un deuxième mariage entre Isabelle, fille aînée de Pierre et le fils aîné du roi anglais34. La formule “infant Pierre, fils aîné de l’illustre roi d’Aragon”, utilisée dans le traité de 1273, est à nouveau présente ici, sans que mention soit faite du roi d’Aragon. À cette date, Jacques Ier et son fils se sont réconciliés35. L’absence de mention du roi ne peut donc être la preuve d’une rupture ou d’une mésentente. Elle est le signe d’une autonomie en matière d’action diplomatique de la part de Pierre. Le consentement officiel du roi n’est plus requis.

Les documents relatifs à cette affaire semblent donc à première vue donner l’image d’un prince héritier dont l’autonomie pourrait en faire l’égal des rois dans le cadre de ce type d’action politique. Un épisode de diplomatie franco-aragonaise datant du début de l’année 1276 paraît appuyer cette conclusion. Le chroniqueur Ramon Muntaner évoque une entrevue entre l’infant Pierre d’Aragon et Philippe III le Hardi pendant laquelle ces deux hommes auraient conclu une alliance interpersonnelle36. L’infant peut donc engager des négociations avec des rois.

Le document principal de notre étude, le contrat de mariage, plaide également en faveur de cette idée en première analyse. Il est fondé sur un principe de do ut des: tant Édouard que Pierre doivent s’engager l’un envers l’autre et jurer sur les Évangiles37. Le document, un chirographe, est signé et conservé par les deux parties. Une forme d’égalité semble donc s’installer. Toutefois, des détails dans la rédaction du document permettent de nuancer cette première hypothèse. Le traité est passé à Sordes, dans les terres du roi d’Angleterre. C’est le prince héritier qui a dû se déplacer, ce qui est le premier marqueur de son infériorité. En outre, le pacte est daté du règne du roi d’Angleterre38. De plus, si le document laisse entendre qu’une dot et le dotalicium ont été négociés, le montant exact n'est pas précisé39. Il reste donc encore une marge de négociation. Le prince héritier n’est pas roi et ne peut donc encore librement disposer des terres de la Couronne.

De ce fait, malgré une autonomie remarquable du prince héritier en matière de diplomatie, son statut n’est pas celui d’un roi. Edouard Ier accepte de traiter avec un prince héritier et de faire pacte avec lui, mais l’analyse diplomatique de la source révèle l’inégalité effective des deux parties.

Cette inégalité même invite à interroger l’action diplomatique du roi d’Angleterre. Ce dernier accepterait-il de faire alliance avec le prince héritier sans l’accord du roi d’Aragon ? Cela semble difficile à imaginer. Henri III d’Angleterre et Jacques Ier d’Aragon avaient déjà, dans les années 1250, essayé d’unir leurs dynasties par un mariage. L’hypothèse la plus vraisemblable est alors qu’il s’agit ici d’une diplomatie envisagée sur le temps long. L’action diplomatique n’est plus pensée en fonction du règne seul, mais également en fonction du règne à venir du prince héritier. De ce fait, on cherche à établir des alliances non seulement pour le temps présent, mais également pour le futur, avec une perspective qui inclut une temporalité plus longue.

Ces deux dynasties maintenaient depuis près d’un siècle des liens diplomatiques qui étaient renouvelés de génération en génération. Le roi d’Aragon a dû laisser une marge de manœuvre diplomatique à son fils pour qu’il traite avec le jeune roi d’Angleterre qui était en termes générationnels plus proche de Pierre : les deux hommes avaient tous deux environ trente-quatre ans. Il est impossible de connaître exactement les circonstances de cette autonomie laissée à Pierre. Cependant il semble difficile de concevoir que Jacques Ierd’Aragon ait été opposé à cette affaire.

Cette perspective d’une diplomatie envisagée sur le temps long se confirme lorsque Alphonse, fils aîné de Pierre d’Aragon, cesse d’être l’objet de la négociation matrimoniale pour devenir à son tour un acteur de cette dernière.

Dans la continuité du père : l’action diplomatique d’Alphonse d’Aragon

En 1276, Pierre d’Aragon devient roi et son fils Alphonse par conséquent prince héritier. Né en 1265, ce dernier était jusqu’alors l’objet des négociations matrimoniales avec la dynastie Plantagenêt. En 1282, âgé de 17 ans, son statut change. À la fin du mois d’avril, Alphonse envoie, en effet, une lettre où il se réjouit des nouvelles qu’il a reçues sur le roi d’Angleterre et sa famille40. Le 12 octobre 1282 il envoie une missive similaire destinée à la famille royale anglaise et en premier lieu à Alphonse de Chester, fils aîné du roi Edouard Ier41. Tout comme leurs pères, ces deux princes héritiers sont en relation. Pierre III d’Aragon se trouve alors en pleine confrontation avec les Anjou pour la Sicile. Dans ce cadre, le roi délègue à son fils le soin d’entretenir les relations de la famille avec celle des Plantagenêts. Comme pour Pierre d’Aragon, l’action du prince héritier Alphonse rentre dans une logique de proximité générationnelle avec l’héritier Plantagenêt.

L’action diplomatique de ce prince s’inscrit donc dans une continuité totale avec celle de son père. Déjà du vivant de Jacques Ier, Alphonse est proclamé héritier de Pierre d’Aragon et donc de la couronne42. Cet événement traduit l’affirmation et l’acceptation du principe de succession par primogéniture dans la Couronne d’Aragon au cours du XIIIe siècle. Dès lors, un prince héritier n’est plus seulement fils de roi, mais également futur roi. Le corps du roi se trouve prolongé dans celui de son fils.

Conclusion

Les cas de Pierre d’Aragon et de son fils Alphonse éclairent le rôle diplomatique actif que les princes héritiers peuvent jouer. Au cours du XIIIe siècle, les traités et alliances engagés entre souverains ne sont plus envisagés comme ponctuels, mais prennent la forme d’alliances héréditaires. De ce fait et alors que l’alliance engage le futur de la dynastie, les princes héritiers prennent part aux actions diplomatiques de la famille. Il semble en effet que les relations avec les princes héritiers de l’étranger leur soient confiées, ou du moins qu’elles soient favorisées. Si le prince héritier Pierre est remarquable par l’apparente autonomie de son action, Alphonse s’intègre pleinement dans ce principe de continuité dynastique.

L’implication diplomatique des héritiers de la couronne prend dès lors une double fonction. Premièrement, elle les forme à un exercice fondamental de leur future fonction de roi. Deuxièmement, elle permet d’envisager les traités et les alliances diplomatiques dans un temps long. Ainsi, ce projet d’alliance matrimoniale mené par Pierre d’Aragon n’est pas un hapax mais s’inscrit dans un contexte ample de relations anglo-aragonaises qui durent depuis plus d’un siècle. Le fait que les princes héritiers jouent un rôle actif dans les relations diplomatiques permet ainsi à ces dernières de s’inscrire dans le temps long de la dynastie et non plus seulement dans celui du règne.

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RODRÍGUEZ LAJUSTICIA, Francisco Saulo - “La relación de Alfonso III de Aragon (1285-1291) con la monarquía inglesa”. Aragón en la Edad Media 30 (2019), pp. 325-349. [ Links ]

SOLDEVILA, Ferran - Pere el Gran. 2 vols. Barcelone: Institut d’estudis catalans, 1950-1956. [ Links ]

1Je remercie vivement le professeur Stéphane Péquignot dont les conseils, remarques et encouragements m’ont été particulièrement précieux pour la rédaction de cet article.

2SOLDEVILA, Ferran - Pere el Gran. 2 vols. Barcelone: Institut d’estudis catalans, 1950-1956; CINGOLANI, Stefano Maria - Pere el Gran: Vida, actes i paraula. Barcelone: Base, 2010.

3KLÜPFEL, Ludwig - Die äussere Politik Alfonsos III. von Aragonien (1285-1291). Berlin-Leipzig : Walther Rothschild, 1911-1912. Francisco Saulo Rodríguez Lajusticia traite de ses relations avec la monarchie anglaise une fois qu’il est roi, cf. RODRÍGUEZ LAJUSTICIA, Francisco Saulo - “La relación de Alfonso III de Aragon (1285-1291) con la monarquía inglesa”. Aragón en la Edad Media 30 (2019), pp. 325-349.

4Cet épisode anglo-aragonais n’apparaît pas dans les chroniques catalanes et aragonaises de l’époque. Toutefois, certaines dimensions de l’action diplomatique du prince héritier Pierre y sont évoquées. Cette question a été examinée dans le séminaire « Relations internationales et diplomatie (1300-1700) » de Stéphane PÉQUIGNOT en 2021-2022. Voir à ce sujet l’introduction à ce dossier. Voir aussi : DESCLOT, Bernat - Llibre del rei en Pere. Éd. Stefano Maria Cingolani. Barcelone: Biblioteca Barcino, 2010; Llibre dels feits del rei En Jaume. Éd. Ferran Soldevila. Les quatre Grans Cròniques. Rév. Jordi Bruguera et Maria Teresa Ferrer i Mallol. Barcelone : Institut d’Estudis Catalans, 2007; MUNTANER, Ramon - Crònica o descripció dels fets e hazanyes del ycnlit rey don Jaume primer rey d’Aragó […] e de molts de ses descendents. Éd. Ferran Soldevila. Les Quatre grans Cròniques. Rév. Jordi Bruguera et Maria Teresa Ferrer i Mallol. Barcelone: Institut d’Estudis Catalans, 2007.

5SOLDEVILA, Ferran - Pere el Gran. vol. 1, p. 294 ; Barcelone, Archivo de la Corona de Aragón, Cancillería, reg. 34, fol. 10v et fol. 102v.

6Barcelone, Archivo de la Corona de Aragón, Cancillería, Pergaminos de Jaime I, Serie general, 2173, édité dans Diplomatari de Pere el Gran. vol. 1: Cartes i Pergamins (1258-1285). Éd. Stefano Maria Cingolani. Barcelone : Fundació Noguera, 2011, doc. 29, pp. 113-114. Copie conservée à Londres, The National Archives sous la référence E 30/12/6 et éditée dans RYMER, Thomas - Foedera, conventiones litterae et cuiuscumque generis. Acta publica inter Reges Angliae et alios quosvis, imperatores, reges, pontifices, principes vel comunitates ab ingressu Gulielmi I. in Angliam, A.D. 1066, ad nostra usque tempora habita aut tractata. Vol. I/2 : 1272-1307. Londres, Record Commission, 1816, p. 506. Autre copie : Londres, British Library, Cotton MS Vespasian C XII, fol. 56 r.

7Londres, The National Archives, SC 1/14/176 et SC 1/12/31. Voir aussi RYMER, Thomas - Foedera, vol. I/2, p. 521 et p. 541.

8RYMER, Thomas - Foedera, vol. I/2, p. 606 ; Diplomatari de Pere el Gran. vol. 2: Relacions internacionals. Éd. Stefano Maria Cingolani. Barcelone: Fundació Noguera, 2015, doc. 454bis, pp. 488-489.

9L’autonomie de l’infant Pierre en matière diplomatique n’est pas un phénomène isolé. Dans ce même dossier de Medievalista nous renvoyons notamment à l’introduction de Stéphane Péquignot ainsi qu’aux articles de Diana Martins et d’Óscar Villarroel González. Les deux articles en question mettent en évidence des périodes pendant lesquelles les infants Alphonse (IV) du Portugal et Alphonse (X) de Castille ont mené des actions diplomatiques autonomes qui servaient leurs propres intérêts.

10MOEGLIN, Jean-Marie (dir.); PÉQUIGNOT, Stéphane - Diplomatie et “relations internationales” au Moyen Âge (IX e -XV e siècle). Paris : Presses universitaires de France, 2017, chapitre V : “Traités et relations internationales au Moyen Âge”.

11BENJAMIN, Richard - “A Forty Years War: Toulouse and the Plantagenets, 1156-96”. Historical Research 61:146 (1988), pp. 270-285. Cette guerre oppose en effet les comtes de Toulouse aux comtes de Barcelone et aux ducs d’Aquitaine pour le contrôle d’un vaste territoire allant de la Provence au midi toulousain. Voir aussi BENITO, Pere - “An Intense but Stymied Occitan Campaign”. In SABATÉ, Flocel (éd.) - The Crown of Aragon. A Singular Mediterranean Empire, Leiden et Boston : Brill, 2017, p. 92-124 ; FERRER I MALLOL, Maria Teresa; RIU, Manuel (dir.) - Tractats i negociacions diplomàtiques de Catalunya i de la Corona catalanoaragonesa a l’edat mitjana. vol. I.1: Tractats i negociacions diplomàtiques amb Occitània, França i els estats italians 1067-1213. Barcelone : Institut d’Estudis Catalans, 2009.

12BENJAMIN, Richard - “A Forty Years War”; GILLINGHAM, John - Richard Coeur de Lion. Paris: Noesis, 1996, p. 124.

13Calendars of the Patent Rolls preserved in the Public Record Office: Henry III. vol. 3 : 1232-1247. Londres : HMSO, 1906-1913, p. 481, 497.

14Une lettre du 24 mai 1253 nomme John Maunsell et Guillaume évêque de Bath et Well procureurs afin qu’ils négocient le mariage de Béatrice, fille d’Henri III, avec le fils aîné du roi d’Aragon, l’infant Pierre. Cf. RYMER, Thomas - Foedera, vol. I/1 : 1066-1272. p. 290.

15En 1257 le prieur de Cornellana, envoyé du roi d’Aragon, se trouvait à la cour d’Angleterre : “have 60 marks to deliver to the bishop of Jaen, envoy of the king of Castile, and 20 marks to deliver to the prior of Cornellana, envoy of the king of Aragon, for their expenses as a gift from the king” (Calendars of the Patent Rolls preserved in the Public Record Office: Henry III. vol. 3 : 1232-1247, p. 558). De même Henri III informe Jacques Ier d’Aragon de son alliance avec Alphonse X, et il existe un projet de rencontre entre les trois souverains (RYMER, Thomas - Foedera, p. 357).

16RYMER, Thomas - Foedera, vol. I/2, p. 506.

17dominus Eduardus, Dei gracia illustris rex Anglie, dominus Hybernie et dux Aquitanie, et illustris infans Petrus, magnifici regis Aragonum primogenitus, volentes inter se dilectionem veram concordiam firmiter duraturam, et eandem per affinitatis vinculum consumare, convenerunt quod predictus dominus rex Anglie desponsaret filiam suam et illustris domine Constancie, uxoris sue” (Barcelone, Archivo de la Corona de Aragón, Cancillería, Pergaminos de Jaime I, Serie general, 2173, édité dans Diplomatari de Pere el Gran. Vol. 1, doc. 29, pp. 113-114). Copie conservée à Londres, The National Archives sous la référence E 30/12/6 et éditée dans RYMER, Thomas - Foedera, vol. I/2, p. 506. Autre copie : Londres, The British Library, Cotton MS Vespasian C XII, fol. 56 r.

18Voir à ce sujet le chapitre “Amitiés et relations internationales” dans MOEGLIN, Jean-Marie (dir.); PÉQUIGNOT, Stéphane - Diplomatie et “relations internationales”, pp. 147-340.

19Il s’agit très certainement d’Aliénor, âgée de quatre ans, et d’Alphonse, fils aîné de Pierre d’Aragon. Il a alors huit ans.

20“predictus dominus rex [...] filiam suam desponsavit per verba de futuro filio predicti domini infantis, et predictus dominus infans, sub simili forma, desponsavit predictum filium suum filie dicti domini regis”. Diplomatari de Pere el Gran. vol. 1, doc. 29, p. 113.

21Ainsi Édouard Ieret l’infant Pierre promettent-ils sur les quatre Évangiles de mener à bien cette entreprise. Pour les fiançailles, voir RIBORDY, Geneviève - “Les fiançailles dans le rituel matrimonial de la noblesse française à la fin du Moyen Âge : tradition laïque ou création ecclésiastique ?” Revue historique 620/4 (2001), pp. 885-911.

22Diplomatari de Pere el Gran. vol. 1, doc. 2, pp. 50-51.

23Il le fiance à Agnès de Nevers, fille d’Hervé comte de Nevers. Cf. Les registres de Philippe Auguste, vol. I. Éd. John. Paris : Imprimerie nationale, 1992, n°81, p. 523.

24Ces troubles sont principalement le fait du vicomte du Béarn Gaston. Cf. ELLIS, Jean H. - Gaston de Béarn: a study in Anglo-Gascon relations (1229-1290). Oxford : Oxford University, 1952. Thèse de doctorat.

25Édouard Ier d’Angleterre avait épousé en 1254 Éléonore de Castille, sœur d’Alphonse X de Castille, dans le cadre d’une alliance anglo-castillane. Cf. RYMER, Thomas - Foedera, p. 298. À la fin de l’année 1273 il essaie en outre de marier son fils Henri à Jeanne de Navarre, héritière du royaume. Cf. Londres, The National Archives, E 36/274, fols. 168v-169r.

26Dans le cadre de la lutte entre Aragonais et Angevins pour le royaume de Sicile. Damien Ruiz évoque cette même possibilité dans le cadre d’une alliance entre Pierre d’Aragon et Philippe III le Hardi en 1276. Voir RUIZ, Damien - ‘’Philippe le Hardi, Pere d’Aragon et l’hostie consacrée : un rite de fraternité dans la Crònica de Ramon Muntaner’’. In AGUILAR, Josep Antoni, MARTÍ, Sadurní, RENEDO, Xavier (éd.) - Dits, fets i veres veritats. Estudis sobre Ramon Muntaner i el seu temps. Barcelone : Publicacions de l’Abadia de Montserrat, 2019, pp. 53-71.

27SOLDEVILA, Ferran - Pere el Gran, vol. I, p. 250.

28SOLDEVILA, Ferran - Pere el Gran, vol. I, p. 293 ; Barcelone, Archivo de la Corona de Aragón, Cancillería, reg. 34, fol. 10v.

29Barcelone, Archivo de la Corona de Aragón, Cancillería, reg. 34, fol. 102v.

30Le chroniqueur le confond avec le futur Édouard II, qui n'est pas encore né à ce moment-là. SÁNCHEZ DE VALLADOLID, Fernan - Crónica de Alfonso X. Éd. Manuel González Jímenez; María Antonia Carmona Ruíz. Murcie : Real Academia Alfonso X el Sabio, 1998.

31Llibre dels feits del rei En Jaume.

32Senher, ieu volgra de N’audoart / e del nobl’ enfan ferma mor” (RIQUER, Isabel de - “Las poesías del trovador Paulet de Marselha”. Butlletí de la Reial Acadèmia de Bones Lletres de Barcelona 38 (1982), pp. 133-205, p. 172).

33Édouard d’Angleterre et Pierre Aragon descendent tous deux du roi Alphonse II d’Aragon, respectivement par la branche provençale et la branche barcelonaise. Ils pouvaient donc techniquement tous deux avancer un droit d’héritage sur ce comté. Ce dernier appartient à Charles II d’Anjou depuis son mariage en 1246 avec Béatrice, fille de Raymond-Bérenger IV de Provence. Les Provençaux s’étaient soulevés contre cela et c’est dans ce cadre que Paulet de Marseille avait trouvé refuge à la cour du roi d’Aragon.

34Londres, The National Archives, SC 1/14/176. Voir aussi RYMER, Thomas - Foedera, vol. I/2, p. 521. Ce genre de mariage “double” n’était pas hors du commun. Voir MOEGLIN, Jean-Marie (dir.); PÉQUIGNOT, Stéphane - Diplomatie et “relations internationales”, p. 276.

35L’infant est en effet nommé lieutenant général de la couronne en 1274. Cf. FRANCISCO OLMOS, José María de - El príncipe heredero en las coronas de Castilla y Aragón durante la Baja Edad Media. Madrid : Universidad Complutense de Madrid, 1995. Thèse de doctorat, p. 239. Voir aussi FRANCISCO OLMOS, José María de - “La evolución de la sucesión al trono en la Europa medieval cristiana : I. Siglos V al XII”. Anales de la Real Academia Matritense de Heraldica y Genealogia 13 (2010), pp. 203-252 ; FRANCISCO OLMOS, José María de - “La evolución de la sucesión al trono en la Europa Medieval Cristiana. II : Siglo XIII. Los casos de Castilla y Aragón”. Anales de la Real Academia Matritense de Heráldica y Genealogía 14 (2011), pp. 169-276 ; FRANCISCO OLMOS, José María de - “La evolución de la sucesión al trono en la Europa medieval cristiana. III : la consolidación de la figura del príncipe heredero en Castilla y Aragón (siglos XIV-XV)”. Anales de la Real Academia Matritense de Heráldica y Genealogía 15 (2012), pp. 209-414.

36Voir à ce sujet RUIZ, Damien - ‘’Philippe le Hardi, Pere d’Aragon et l’hostie consacrée’’.

37Et ad maiorem firmitatem habendam, predictus dominus rex et predictus infans iuraverunt super sancta quatuor Dei Evangelia predicta attendere et complere ut supra continetur”. Diplomatari de Pere el Gran. vol. 1, doc. 29, p. 113-114.

38Datum et actum in predicta villa Sordue anno et die prefixis, regni predicti domini regis Anglie anno primo”. Diplomatari de Pere el Gran. vol. 1, doc. 29, p. 113-114.

39Promisit etiam predictus dominus infans prefato domino regi, quod tempore matrimonii faciet augmentum ad dotem quam filia eiusdem domini regis afferet viro suo, secundum quantitatem dotis, scilicet augendo ipsam dotem in tercia parte plusquam sit ipsa dos, vel dabit arras secundum morem regni Aragonum, qui est quod assignentur domine certa loca que, vivento viro, tenet et percepit et habet redditus omnes ipsorum locorum ad utilitates suas inde faciendas”. Diplomatari de Pere el Gran. vol. 1, doc. 29, p. 113-114.

40RYMER, Thomas - Foedera, vol. I/2, p. 606.

41“[D]omino Aduardo, illustris regis Anglie primogenito, infans Alfonsus, illustris regis Aragonum primogenitus et heres” (Diplomatari de Pere el Gran. vol. 2, doc. 454bis, p. 488-489).

42Voir CINGOLANI, Stefano Maria - Pere el Gran, p. 348 ; FRANCISCO OLMOS, José Maria de - El príncipe heredero, p. 240.

Received: October 24, 2023; Accepted: April 19, 2024

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