Sommaire: 1. Introduction; 2. La place de l’autonomie de la volonté dans le contrat international d’agence commerciale au sein de l’UE et du Mercosur; 3. Le contrat d’agence commerciale dans l’ordre juridique international: une protection a geometrie variable ; 4. Conclusion; 5. Références.
Summary: 1. Introduction; 2. The place of parties' autonomy in the international commercial agency contract within the EU and Mercosur; 3. The commercial agency contract in the international legal order: protection with variable geometry; 4. Conclusion; 5. References.
1 INTRODUCTION
Comme l’affirme Diloy, “la question du choix de la loi applicable est importante justement parce que dans le cadre international, les droits nationaux relatifs au contrat d’agence commerciale sont divergents et les tentatives de rapprochement ont un effet relativement restreint”3.
Dans cette perspective, notamment quand on est en face d’un contrat international d’agence commerciale, les questions portant sur la loi applicable et l’étendue de l’autonomie de la volonté des parties sont essentielles. Toutefois, quelle est la place actuellement de l’autonomie de la volonté dans les contrats internationaux d’agence commerciale au sein de l’Union européenne (UE) et du Mercosur? Autrement dit, est-ce que le principe de l’autonomie de la volonté semble être autant reconnu par le Brésil et d’autres pays du Mercosur comme au sein de l’UE ?
L’intérêt du sujet est indéniable non seulement en termes de sécurité juridique, mais également du point de vue du développement du commerce international. En effet, on peut espérer que l’accord de libre-échange entre le Mercosur et l'Union européenne va multiplier les activités des intermédiaires, notamment des agents commerciaux et aussi mettre en évidence tant les différences en termes du droit substantiel applicable en la matière que les divergences en termes de règles de conflit de lois, notamment la place à accorder à l’autonomie de la volonté au sein du contrat international d’agence commerciale.
En effet, très souvent dans le cadre d’un contrat international, les parties expriment leur volonté en ce qui concerne la loi applicable au contrat et la juridiction compétente pour connaître les litiges relevant dudit contrat. Cela serait la situation a prime abord plus juste ou raisonnable: les deux parties négocie leur choix et sont ainsi conscientes des risques engendrés par l’inclusion de ces clauses au contrat. Cette autonomie de la volonté conférée aux parties semble, donc, bénéficier la confiance de celles-ci lors de la conclusion du contrat, favorisant également la sécurité juridique en ce qui concerne l’exécution du contrat et la résolution des éventuels litiges.
Toutefois, orientée par une révision de la littérature spécialisée, ainsi que par l’analyse de la jurisprudence, la présente étude va démontrer que cette sécurité juridique procuré par l’insertion d’une clause de loi applicable au contrat international d’agence commerciale doit être nuancée. D’abord, dans le cadre de l’UE par l’implication de la notion de loi de police et, ensuite, dans certains pays comme le Brésil, par le rôle limité de l’autonomie de la volonté comme règle de conflit de lois.
2 LA PLACE DE L’AUTONOMIE DE LA VOLONTE DANS LE CONTRAT INTERNATIONAL D’AGENCE COMMERCIALE AU SEIN DE L’UE ET DU MERCOSUR
Le principe de l’autonomie de la volonté semble être consolidé dans le droit de l’UE, malgré les implications des notions de loi de police et d’ordre public. En revanche, tel n’est pas le cas du Mercosur, où on constate, d’abord, l’absence d’un droit conventionnel en matière de règles de conflit de lois applicables aux contrats, y compris le contrat international d’agence commerciale, et, deuxièmement, à l’exception de l’Argentine, une reconnaissance affaiblie du principe de l’autonomie de la volonté par le droit positif et la jurisprudence nationale des pays composant le bloc.
2.1 Un principe façonné par le concept de loi de police et d’ordre public dans l’UE
L’autonomie de la volonté semble être la règle en droit conventionnel de l’UE en ce qui concerne le choix du droit applicable. De même, en ce qui concerne la liberté d’inclusion d’une clause attributive de juridiction dans le contrat international d’agence commerciale. Néanmoins, ce principe n’échappe pas aux enjeux des concepts de lois de police et d’ordre public.
2.1.1 L’autonomie concernant le choix du droit applicable
Le principe de l’autonomie de la volonté est consacré par l’art. 3, § 1° du Règlement Rome I, “Le contrat est régi par la loi choisie par les parties”. Ainsi, Hanine-Roussel met en exergue que “En vertu du principe d'autonomie, les obligations contractuelles sont soumises à la loi choisie par les parties. Le choix, qui peut être exprès ou tacite, s'impose aux parties et aux juges ou aux arbitres”4.
Certes, le règlement Rome I ne vise pas le contrat d’agence d’une quelconque manière particulière, mais celui-ci reste un contrat et, d’ailleurs, sera soumis aux dispositions du règlement en matière de conflits de lois. Ainsi, le contrat international d’agence commerciale é a priori régi par la loi choisie par les parties de manière expresse ou tacite.
Cela est également le principe posé par la convention de La Haye qui est entrée en vigueur le 1er mai 1992, malgré le fait qu’au sein de l’UE seulement la France et le Portugal l’ont ratifiée. En effet, l’art.5, al.1 de ladite convention préconise: “La loi interne choisie par les parties régit le rapport de représentation entre le représenté et l'intermédiaire”. Comme l’évoque Diloy, la convention de La Haye vient établir un régime juridique propre en termes de règles de conflits de lois en pour les contrats d’intermédiaires, même s’elle ne se limite pas aux contrats d’agence commerciale.
Donc, comme l’explique Hanine-Roussel, en France, en ce qui concerne les règles de conflit de lois “La convention de La Haye du 14 mars 1978 et la Convention de Rome du 19 juin 1980, remplacée par le règlement CE 593/2008 du 17 juin 2008 (règlement Rome I), contiennent les nouvelles règles de droit international privé qui régissent le contrat d'agence et remplacent les règles précédentes d'origine jurisprudentielle”5.
Il convient de préciser que comme le règlement Rome I est un instrument général et la convention de La Haye est une convention spéciale, celle-ci l'emporte sur le règlement Rome I lorsqu'il s'agit de résoudre un problème de conflit de lois en matière d'agence commerciale en France ou au Portugal. En effet, l’art. 25, § 1° du règlement Rome I dispose “Le présent règlement n'affecte pas l'application des conventions internationales auxquelles un ou plusieurs États membres sont parties lors de l'adoption du présent règlement et qui règlent les conflits de lois en matière d'obligations contractuelles”. En tout état de cause, les deux conventions posent l’autonomie de la volonté comme principe. En outre, il convient de préciser, sur le champ d’application de la convention de La Haye, que celle-ci n’envisage pas les questions de capacité, forme du contrat ou encore de preuve du contrat d’agence commerciale et, donc, peut s’appliquer de manière complémentaire au règlement Rome I et aux droits nationaux (art.2 de la convention de La Haye).
En outre, comme l’évoque Hanine-Roussel, la convention de La Haye et le règlement Rome I sont applicables sans condition de réciprocité, et même si la loi applicable au fond qu'elles désignent, est celle d'un État tiers6.
Ainsi, le droit international privé conventionnel européen préconise l’application de la loi choisie par les parties comme le principe en termes de règle de conflit de lois. C’est seulement dans l’absence de choix par les parties (expresse ou tacite) qu’une autre règle de conflit de loi sera appliquée. En effet, même dans le défaut d’une clause de droit applicable dans le contrat, “Les tribunaux chercheront à déduire de certains éléments du contrat la volonté des parties”7, par exemple, par le biais d’une clause attributive de juridiction à un tribunal d’un Etat déterminé, la monnaie de payement ou même la langue utilisée lors de la rédaction du contrat, cela se traduisant en un choix tacite de loi applicable.
Comme l’explique Hanine-Roussel en faisant référence à la jurisprudence française, l’analyse d’un possible choix tacite de loi applicable relève du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond “La recherche de la volonté implicite des parties relève du pouvoir souverain d'interprétation des juges du fond”8. De ce fait, c’est la loi choisie par les parties qui va régir la relation principal-agent.
Comme l’affirment certains auteurs9, la force du principe de l’autonomie au sein de l’UE est également illustrée par la possibilité de choisir plusieurs lois à être appliquées sur la relation principal-agent (art.3§1 du règlement Rome I). Comme l’évoque Diloy, “Les cocontractants sont autorisés à morceler leur contrat. Autrement dit, ils peuvent diviser ou dépecer leur contrat en plusieurs parties, lesquelles relèveront de lois différentes”10. Un autre signe de cette primauté de l’autonomie de la volonté en droit conventionnel de l’UE est démontré par la possibilité accordée aux parties à modifier le choix de la loi qu’elles ont initialement effectué (Art.3§4 du règlement Rome I).
De plus, comme le met en exergue Diloy, “Les parties d’un contrat d’agence jouissent d’une totale liberté quant aux choix du droit appelé à régir leur relation. Il n’est pas exigé que le contrat présente des liens effectifs avec l’Etat dont la loi est retenue”11. Même si l’auteur prémentionnée nuance cette liberté, en expliquant que le respect des dispositions impératives édictées par l’Etat auquel se rattache normalement le contrat sera encore exigé. Ce qui sera abordée dans le point 3 de cette sous-partie. De plus, comme l’explique Roussel, la clause de droit applicable doit être précise,
“posera un problème la clause se référant à un droit fédéral (droit américain, droit suisse, ou droit britannique notamment) alors que le droit des contrats relève du droit des États fédérés et il faudra alors déterminer la loi de l'État qui est applicable au contrat”12.
Il convient de préciser également que, devant les juridictions étatiques seulement le choix d’un droit étatique est accepté, en excluante ainsi, la possibilité d’élégir la lex mercatoria ou les principes généraux du droit international comme loi applicable13. En ce sens, Hanine-Roussel met en évidence la jurisprudence de la Cour de cassation qui dans un arrêt du 21 juin 1950 a jugé que “tout contrat international est nécessairement soumis à la loi d'un État” (Cass. civ., 21 juin 1950, Messageries Maritimes).
Une autre limite à l’autonomie des parties, en ce qui concerne le choix de la loi applicable, est constituée par l'intervention des lois de police. D’après Hanine-Roussel, “vient perturber la mise en œuvre de la règle de conflit, telle que déterminée par le droit commun ou le droit conventionnel”14.
2.1.2 L’autonomie concernant la clause attributive de juridiction
Les parties aux contrats internationaux d’agence commerciale sont aussi autonomes pour élégir la juridiction compétente pour connaître du contrat en cas de litige. En effet, par le biais d’une clause attributive de juridiction les parties peuvent soumettre le contrat aux juridictions étatiques ou arbitrales (clause compromissoire).
A l’instar du choix du droit applicable, c’est seulement dans l’absence d’un choix des parties représenté par l’inclusion dans leur contrat d’une clause attributive de juridiction qu’une autre règle de conflit de juridiction sera applicable. En ce sens, affirme Hanine-Roussel “En l'absence de clause attributive de juridiction, est compétent le tribunal du pays où la prestation de l'agent commercial a été exécutée, c'est-à-dire du pays dans lequel le contrat d'agence reçoit exécution”15.
2.1.3 Les enjeux des concepts de loi de police et d’ordre public
Comme le rappel Bernardeau,
“le droit conventionnel de l’UE reconnaît la primauté de la loi d'autonomie, tout en réservant l'application tant des lois de police du for que des lois de police étrangères”16.
En ce même sens, affirme Diloy
“le processus de détermination de la loi applicable au contrat d’agence subi les effets perturbateurs des lois de police et de l’ordre public. La liberté pour les parties de choisir la loi de leur contrat ou la faculté pour le juge étatique ou arbitral de déterminer la loi applicable, se sont donc pas absolues”17.
Ainsi, très concrètement, la loi applicable au contrat en vertu du choix des parties peut être écartée en présence d'une loi de police ou d’une disposition d’ordre public du juge saisi.
D’ailleurs, d’où tout l’intérêt des juges du for de qualifier leur loi nationale en tant que “loi de police” ou d’identifier une règle d’ordre public pour évincer les dispositions de la loi choisie. En effet, l’art. 21 du règlement Rome I prévoit “L'application d'une disposition de la loi désignée par le présent règlement ne peut être écartée que si cette application est manifestement incompatible avec l'ordre public du for”. En outre, l’art. 9 du règlement Rome I définit la loi de police comme “une disposition impérative dont le respect est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde de ses intérêts publics, tels que son organisation politique, sociale ou économique, au point d'exiger l'application à toute situation entrant dans son champ d'application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat d'après le présent règlement”.
Pour Ferry cité par Hanine-Roussel “les lois de police sont des règles juridiques impératives dont l'intensité est encore plus forte que celles des lois d'ordre public interne”18. Ainsi, les lois de police, différemment des lois d’ordre public interne, ont vocation à être appliqués aux contrats internationaux d’agence commerciale et ainsi emporter sur les dispositions de la loi choisie par les parties. Cette qualification des lois nationales en tant que loi de police ou des lois d’ordre public interne relevant des juges nationaux, raison pour laquelle pour certains auteurs, un contrôle plus strict de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur cette qualification serait souhaitable19.
2.2 Une reconnaissance limitée au sein du Mercosur
La reconnaissance de la primauté de l’autonomie de la volonté dans les contrats internationaux y compris d’agence commerciale au sein du Mercosur est bien limitée. A ce propos, il convient d’abord de constater, l’absence d’un quelconque droit conventionnel au sein du bloc pour uniformiser les règles concernant la loi applicable aux contrats internationaux d’agence commerciale, ensuite, évoquer les règles de droit international privé de certains Etats membres, démontrant le rôle limité du principe de l’autonomie de la volonté et enfin, on s’intéressera également aux apports de la Convention Interaméricaine sur la loi applicable aux contrats internationaux en la matière, dénotant l’importance pour les Etats membres du Mercosur de la ratifier.
2.2.1 L'absence d'harmonisation ou d’uniformisation du droit applicable au contrat d'agence commerciale au sein du Mercosur
En 1991, le Traité d'Asuncion a été signé donnant naissance au Marché commun du Sud (Mercosur) qui vise la promotion de la libre circulation des biens, des services et des facteurs de production dans la région et également, la mise en place d’un processus continu d’intégration économique, culturelle, juridique et politique des Etats membres.
Premièrement, il n'existe pas au Mercosur un droit conventionnel régissant le droit matériel applicable aux contrats d'agence commerciale. Deuxièmement, il n'existe pas non plus, à ce jour, une norme unique qui traite de la détermination de la loi applicable aux contrats internationaux, y compris le contrat d'agence commerciale internationale. Ainsi, le principe de l’autonomie reçoit un traitement très différent selon le système juridique, ce qui génère un résultat négatif pour l'avancement du bloc économique lui-même.
Certes, la question de la juridiction compétente et, donc, des clauses attributives de juridiction est plus avancée. En effet, le Protocole de Buenos Aires sur la compétence juridictionnelle internationale en matière contractuelle du 5 août 1994 (Protocole) réglemente la juridiction compétente relative aux contrats internationaux à caractère civil ou commercial conclus entre personnes physiques ou morales.
En effet, s'agissant des clauses d’élection de juridiction, l'art. 4 dudit protocole dispose: “Dans les conflits nés de contrats internationaux en matière civile ou commerciale, sont compétents les tribunaux de l'Etat partie dont la juridiction les parties contractantes sont convenues de se soumettre par écrit, des lorsqu'un tel ajustement n'a pas été obtenu de manière abusive”. Ainsi, autorisant l'autonomie de la volonté quant à la juridiction applicable. Cependant, comme prévu au protocole, et rappelé à l'art. 111 du Code de procédure civile brésilien, l'accord de volonté entre les parties par rapport à la juridiction compétente “ne prend effet que lorsqu'elle est contenue dans un contrat écrit et fait expressément référence à un rapport juridique déterminé”.
Il convient de préciser, en ce qui concerne le champ d’application du Protocole, que son art.1er prévoit sont application dans les cas suivants: a) les personnes physiques ou morales, qui ont conclus le contrat international à caractère civil et commercial, sont domiciliées ou ont leur siège social dans les Etats parties au Traité d'Asuncion ; b) lorsqu'au moins une des parties au contrat a son domicile ou son siège social dans un Etat partie et qu'en outre un accord d'élection de for est intervenu en faveur d'un juge d'un Etat partie et existe un lien raisonnable entre la juridiction choisie et la matière en cause, en vertu des règles de compétence du propre Protocole.
De plus, l'article 2 du Protocole exclut de son champ d'application matériel, les matières relatives à la faillite, les successions, les contrats de transport, les contrats d'assurance, entre autres. Dès lors, ce Protocole est applicable au contrat d'agence commerciale internationale et pose comme principe l'autonomie de la volonté concernant le choix de la juridiction compétente.
Cependant, en termes de droit applicable aux contrats internationaux, y compris le contrat d'agence commerciale, le Mercosur n'a élaboré à ce jour aucune norme pour harmoniser les législations des Etats membres.
En fait, une telle harmonisation serait une étape clé pour dynamiser les relations économiques entre les Etats du bloc et entre ces Etats et d'autres, notamment dans l’attente de l'entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange entre le Mercosur et l'UE.
2.2.2 La reconnaissance limitée de l'autonomie de la volonté en tant que règle de conflit de lois
Le défi d'harmonisation, au sein du Mercosur, au moins les règles concernant le droit applicable au contrat d'agence commerciale internationale est lié à la nécessité d'une réforme importante du droit interne de certains pays comme le Brésil, où l'autonomie de volonté n'est pas reconnue. Comme l'a noté Franceschini,
“le droit international privé brésilien actuel n'englobe pas l'autonomie de la volonté comme élément de rattachement dans une question de droit applicable aux contrats”20.
Il est intéressant de noter que les règles du droit international privé brésilien remontent à 1988, étant codifiées dans le chapitre “Loi d'introduction aux règles du droit brésilien” de la Constitution brésilienne.
Ainsi, il convient de préciser que la règle de conflit de lois, selon le droit international privé brésilien, pour qualifier et régir les obligations est la lex loci contractus, c’est-à-dire, c’est la loi du pays dans lequel les obligations sont constituées qui s’appliquera (l'art. 9 de ladite Loi d'introduction). Donc, la loi applicable aux contrats internationaux est celle du pays où le contrat a été conclu, à l’exception du contrat international de travail et des contrats de transfert de technologie.
Le deuxième alinéa de l'art. 9 précise que “L'obligation résultant du contrat est réputée avoir été constituée au lieu où réside celui qui propose le contrat”. D’ailleurs, la loi applicable au contrat international d’agence commerciale sera très concrètement, selon le droit brésilien, celle du pays où le contrat a été signé par les parties et dans l’impossibilité de l’identifier (contrats électroniques, contrats non-écrits conclus, par exemple, pour échange téléphonique, entre outres), celle du lieu de résidence de la partie qui propose le contrat.
Ainsi, comme l’explique Brancher21 en parlant de “l’identification de la partie qui propose le contrat”, celle-ci est définie comme la partie qui établit les conditions essentielles du contrat. Donc, dans le cas du contrat international d’agence commerciale, on peut supposer que cela sera souvent la figure du principal. Par conséquence, la règle de conflit de lois a un grand potentiel de favoriser finalement la législation du pays de résidence du principal. En outre, la notion de “résidence” n’est pas toujours très aisée à définir. La doctrine et la jurisprudence défendant parfois des critères différents comme le siège ou le lieu de l’exercice des activités principales.
De plus, il convient de noter que pour Basso22, cette disposition sur la règle de conflit de lois (art.9 de la Loi d’introduction) est d’ordre public et ne saurait être évincée. Raison pour laquelle il serait conseillé de conclure le contrat dans le pays dont la loi devrait régir celui-ci, selon la volonté des parties23. Or, cela ne peut pas être considérée comme une quelconque reconnaissance “indirecte” du principe de l’autonomie de la volonté comme le préconise certains auteurs24.
Cependant, la loi choisie par les parties pourra éventuellement être appliquée car le droit brésilien autorise le renvoi, contrairement au droit de l'UE. Ainsi, si le contrat a été conclu dans l'État X et que le système juridique de celui-là permet le choix entre les parties de la loi applicable au contrat, celle-ci sera applicable.
En ce sens, la jurisprudence de la Cour suprême de justice brésilienne (STJ) dans un arrêt de 2007 (STJ, 2007, CIACI Ltda v. Lubrizol Corp) appliquant la lex loci contractus à un contrat international d’agence commerciale.
En l'espèce, la loi choisie par les parties était la loi de l'État de New York, où le contrat avait été aussi constitué. Donc, finalement la loi de l'État de New York a été appliquée. Cependant, il convient de noter que les dispositions de celle-ci ont reçu application (l'agent n'ayant pas de droit à indemnité à la fin du contrat), non pas parce qu'il existait une clause de droit applicable, mais parce que cela était la lex loci contractus. Un autre apport de cet arrêt est que selon la Cour, les dispositions du droit brésilien régissant l’agence commerciale n’ont pas un caractère de lois et police ou d’ordre public international.
En tout état de cause, comme l’affirme Araujo, “ Malgré la tendance mondiale à la réception et au respect du principe de l’autonomie dans les contrats internationaux, le droit international privé du Brésil n'accepte pas le choix de la loi applicable comme élément de rattachement, mais seulement la lex loci contractus ”25. Comme le conclut l'auteur, cette règle de rattachement n'est pas satisfaisante, car elle peut souvent conduire à soumettre le contrat à la législation d'un pays simplement occasionnel.
On pouvait s'attendre, en ce sens, à une orientation jurisprudentielle, mais comme le souligne Araujo, “les tribunaux brésiliens n'apprécient guère le sujet dans leurs jugements, et quand ils le font, ils décident de ne pas reconnaître le principe de l'autonomie de la volonté”26.
Ainsi, en revenant au cas qui a inspiré la présente étude, on pourrait dire que, face à une juridiction étatique brésilienne, le choix des parties d'appliquer la loi française aurait des chances de n’être pas respecté. En effet, le raisonnement du juge suivrait, selon le droit positif brésilien, le chemin suivant: 1) lieu de conclusion du contrat ; 2) règle de conflit de loi dans le lieu de conclusion, 3) loi applicable au contrat.
Alors, si le contrat était conclu dans n'importe quel État membre de l'UE, on pourrait dire que, oui, la législation française s'appliquerait finalement. Cependant, si le contrat était signé au Brésil, par exemple, la législation nationale brésilienne s'appliquerait.
Il convient également d'aborder ici la question de l'exécution du jugement. Si le principal ne dispose d'actifs qu'en France, par exemple, cette divergence entre les Etats par rapport à la loi applicable pourrait rendre difficile la reconnaissance du jugement, et ainsi entraver les relations commerciales. Cela est une raison qui souligne une fois de plus l'importance de reprendre les négociations concernant l'adhésion des États à la convention de La Haye ou l'élaboration d'une autre convention spécifique qui réglemente au moins les règles de conflit de lois applicables au contrat d'agence commerciale internationale.
Dans cette perspective, malgré le fait que la Colombie n'intègre pas la liste de membres effectifs du Mercosur (à ce jour, elle a un statut d’observateur), il est intéressant d'indiquer que, selon son Code de commerce (art.1328), le contrat d’agence commerciale conclu à l'étranger et exécuté en Colombie sera régi par le droit national colombien et toute stipulation contraire sera réputée non écrite. Ainsi, comme l’explique Alban, une éventuelle clause de droit applicable déterminant l’application d’un droit étranger ne serait pas observée27.
Ainsi, démontrant la divergence du droit international privé des Etats par rapport au contrat international d'agence commerciale.
En effet, l’Argentine est l’unique, parmi les Etats membres analysés, où l’autonomie de la volonté des parties de choisir le droit applicable à leur contrat est reconnue. Il convient de rappeler, à cet effet, qu’il s’agit également de l’unique Etat de l’Amérique du Sud qui a ratifié la convention de La Haye.
D’ailleurs, en conséquence, son droit interne est en consonance au principe posé par la propre convention de La Haye, selon lequel la loi applicable au contrat international d’agence commerciale est celle choisie par les parties. Donc, comme l’explique Porcelli28, le Code civil et commercial argentin prévoit à son art. 2651 que “Les contrats sont régis par la loi choisie par les parties”. Cependant, comme l’évoque l’auteur précitée, cette règle est applicable qu’aux contrats internationaux, les parties ne pouvant pas accorder l’application d’un droit étranger aux contrats internes. En outre, certaines dispositions du Code civil et commercial argentin en matière d’agence commerciale ont un caractère impératif, cela étant le cas, par exemple, des dispositions relatives au préavis et à la réparation.
En revanche, au Paraguay, c’est la Loi 194/1993 qui établit le régime juridique applicable aux relations contractuelles entre “les fabricants et les entreprises étrangères” et les personnes physiques ou morales domiciliées au Paraguay.
En effet, cette loi prévoit des dispositions applicables tant au contrat international d’agence commerciale qu’au contrat de distribution, ce qui sera mieux détaillé dans la seconde partie de la présente étude. Néanmoins, il est important d’évoquer ici que, selon la jurisprudence du Paraguay, cette loi serait d’ordre public internationale29 (art. 9 de la Loi 194/1993) et, donc, les parties ne sauraient évincer ce qui est prévu par celle-ci. De plus, il convient de noter que son art.10 dispose “Les parties se soumettront à la compétence territoriale des Tribunaux de la République”, ainsi, soit aux juridictions étatiques ou arbitrales, mais en tout cas au Paraguay. Dans cette perspective, comme l’explique Silva30, la compétence juridictionnelle peut être étendue en faveur des organes juridictionnels ou des tribunaux arbitraux des Etats membres du Mercosur, en vertu du Protocole de Buenos Aires. Toutefois, il n’est pas possible de l’étendre en faveur d'un autre for étranger. De plus, en tout état de cause, les prévisions de la Loi 194/1993 devraient être observées.
Enfin, il est intéressant de noter que l'autonomie de la volonté par rapport à la loi applicable ne prévaut en droit brésilien que lorsqu'il existe une clause compromissoire.
Comme l'indique Stralhoto, la loi brésilienne sur l'arbitrage (Loi 9307/96) a favorisé une avancée significative dans le domaine de l'autonomie de la volonté en permettant aux parties, que ce soit dans un contrat national ou international, de choisir loi applicable, y compris les principes généraux du droit.
3 LE CONTRAT D’AGENCE COMMERCIALE DANS L’ORDRE JURIDIQUE INTERNATIONAL: UNE PROTECTION A GEOMETRIE VARIABLE
Malgré certaines initiatives d’uniformiser le droit applicable au contrat international d’agence commerciale ou au moins les normes concernant les règles de conflit de lois, force est de constater qu’à ce jour, il y a une absence de droit uniforme régissant la matière. Comme l’affirme Diloy, au sein de l’UE on peut parler d’une harmonisation minimale, après l’institution de la directive de 1986. Toutefois cela reste limité à l’UE et, nonobstant, l’harmonisation, des différences entre les régimes juridiques applicables au contrat d’agence commerciale existent encore entre les Etats membres de l’UE. Cela soit en raison de la marge d’appréciation accordée aux Etats lors de la transposition (système de dédommagement, par exemple), soit parce que la matière n’est pas régie par la directive de 1986 et relève, donc, plutôt du droit national. En effet, la différence de régime juridique applicable aux contrats d’agence commerciale est encore plus marquante si on regarde les dispositions en la matière des lois nationales des Etats membres du Mercosur. Ce qui met davantage en évidence, l’importance du choix de la loi applicable et de la clause attributive de juridiction.
3.1 L’absence d’un droit international uniforme en matière d’agence commerciale
Comme on l’a démontré, les règles de conflit de lois varient sensiblement entre l’UE et les Etats membres du Mercosur, en termes de loi applicable au contrat d’agence commerciale. Dans cette perspective une règle de droit substantiel serait encore plus importante, favorisant le développement d’une assise sûre aux rapports internationaux et, en conséquence, l’expansion du commerce international31.
Ainsi, même si la figure de l’agent commercial n’est pas récente, comme on l’a évoqué précédemment, une uniformisation du droit en matière d’agence commerciale n’a pas aboutie. Au sein de l’UE, la directive de 1986 a permis une uniformisation minimale, mais il semble être l’unique exemple de droit conventionnel régional qui régit la matière32.
Toutefois, la directive de 1986 ne fournit pas une règlementation complète, les relations juridiques avec les tiers, par exemple, ne sont pas traités. De plus, il y a une certaine marge d’appréciation aux Etats, par exemple, en ce qui concerne le choix du système d’indemnisation et l’imposition ou non d’un contrat écrit comme condition de forme. Sur ce dernier point, il est intéressant de signaler qu’en France un contrat écrit n’est pas exigé, à l’inverse, de l’Italie et de l’Irlande, par exemple. Donc, certains aspects son encore régis par les droits nationaux des Etats membres et sont sources de différenciation du droit appliqué au contrat d’agence commerciale.
Certains pays vont aussi au-delàs de la directive de 1986 qui limite le champ d’intervention de l’agent commercial aux achats et ventes de marchandises. En effet, l’art. 1, §2 de ladite directive dispose “l’agent commercial est celui qui, en tant qu'intermédiaire indépendant, est chargé de façon permanente, soit de négocier la vente ou l'achat de marchandises pour une autre personne, (…) soit de négocier et de conclure ces opérations au nom et pour le compte du commettant”. Ainsi, comme l’explique Diloy, en droit français et belge l’agent peut aussi intervenir dans le domaine des services33, ne perdant pas la qualité d’agent commercial et donc la protection accordée par le régime juridique respectif.
En outre, la directive de 1986 ne donne pas une définition de “commettant”, c’est-à-dire, le principal ou mandant. Ainsi, cela relève aussi des droits nationaux. En ce qui concerne le droit français, d’après Hanine-Roussel, “Il résulte de l'article L. 134-1 du Code de commerce que le mandant doit être un producteur, un industriel ou un commerçant. Si les deux derniers termes sont parfaitement clairs, le premier doit être explicité, ce vocable n'ayant pas de sens juridique précis”34
Dans cette perspective, cela fait l’objet des débats doctrinaires et jurisprudentielles. Comme l’indique Hanine-Roussel, “La Cour de cassation a admis récemment qu’un architecte d’intérieur pouvait conclure un contrat d’agence. Mais, une mutuelle n'est pas un producteur, pas plus qu'elle n'est industriel ou commerçant”35
En effet, comportant que 23 articles, la directive de 1986 vient établir un socle minimum de protection à l’agent commercial et notamment défendre son droit à la rémunération et à la réparation ou indemnité en fin de contrat. Certes, la directive de 1986 prévoit aussi certains droits et obligations des agents et des principaux, mais les chapitres III (Rémunération) et IV (Conclusion et fin du contrat d'agence) sont les plus extensifs.
3.2 Un aperçu de droit comparé: les contrats d'agence commerciale dans la pratique internationale des pays du Mercosur
Pour démontrer la diversité des règles nationales du point de vue du droit comparé, la présente étude a décidé d’analyser le droit national du Brésil, de l’Argentine et du Paraguay en matière de contrat international d’agence commerciale en les contraposant au droit de l’UE et notamment le droit français.
On constate que malgré certaines similitudes, il reste évident que le niveau de protection des agents commerciaux est encore très différent, ce qui met l’accent sur l’importance de la question de la loi applicable au contrat et donc, des règles de conflit de lois, notamment la place de l’autonomie de la volonté.
Il convient de préciser qu’au Brésil le contrat d’agence commerciale est régi par les arts. 710 à 721 du Code civil et la Loi 4.886 de 1965. En Argentine par les arts. 1479 à 1501 du Code civil et commercial et au Paraguay par la Loi 194/1993. Il convient de noter que le champ d’application de la Loi 194/1993 est bien spécifique, à savoir, quand le principal est une personne morale étrangère et l’agent, une personne physique ou morale domiciliée au Paraguay.
3.2.1 Les similitudes entre les droits nationaux en matière d’agence commerciale
A l’instar du droit français et de la majorité des pays de civil law, dans les droits nationaux des pays du Mercosur analysés a priori i) l’agent ne représente pas le principal, ce pouvoir devant découler d’un mandat exprès. En outre, au sein de tous les droits nationaux analysés, ii) un contrat à durée déterminée qui continue à être exécuté après la fin prévue du contrat est requalifiée de contrat à durée indéterminée. Ainsi, le contrat d’agence commerciale aurait vocation à se perdurer dans le temps.
De plus, comme en France, le Brésil et l’Argentine prévoient la iii) possibilité de sous-agencement. Néanmoins, la législation brésilienne accorde cette possibilité à l’agent à défaut d’une clause interdisant cela (art.42 de la Loi 4.886/1965). En revanche, la législation argentine admet le sous-agencement seulement s’il est autorisé expressément par le principal “L’agent ne peut, sauf consentement exprès de l'employeur, instituer des sous-agents” (art. 1500 du Code civil et commercial).
En ce qui concerne les iv) frais et les couts engendrés par les activités de l’agent, a priori cela est à la charge de l’agent, sauf si les parties accordent autrement (art.713 du Code civil brésilien et art.1490 du Code civil et commercial argentin), à l’instar du droit français.
Enfin, v) les obligations du principal et de l’agent semblent plutôt converger, ainsi que les motifs de rupture justifiée du contrat. Les législations nationales prévoyant, comme l’indique le tableau I, des obligations gravitant autour du droit à l’information ; à la rémunération, ainsi que du devoir de diligence et bonne foi.
3.2.2 Les divergences
Le premier aspect de divergence est celui concernant la rémunération de l’agent. Certes, tous les droits nationaux affirment le droit de l’agent à percevoir des commissions y compris après la fin du contrat dans certains cas (s'il existe des opérations promues par l’agent, mais conclues postérieurement à la résiliation du contrat d'agence, par exemple). Toutefois, i) le moment du paiement des commissions est très divergent. En Argentine, “La commission doit être payée à l'agent dans les vingt jours ouvrables à compter du paiement total ou partiel du prix au principal” (art.1488 du Code civil et commercial). En revanche, au Brésil, “Le paiement des commissions doit être effectué avant le 15 du mois suivant le règlement de la facture, accompagné des copies respectives des factures” (art.32, §1 de Loi 4.886/1965).
De plus, ii) la clause du ducroire n’est pas admise au Brésil et en Argentine, au contraire du cas de la France (art.1482 du Code civil et commercial argentin).
A ce propos, on pourrait se demander sur l’utilité de cette clause, compte tenu du fait que au sein de l’Argentine et du Brésil, le paiement des commissions à l’agent semble déjà en quelque sorte liée à l’encaissement des factures par le principal. En ce sens, l’art. 32 de la loi brésilienne 4.886/1965 “Le représentant commercial acquiert le droit aux commissions lors du paiement des commandes. Aucune rétribution ne sera due au représentant commercial si le défaut de paiement résulte de l'insolvabilité de l'acheteur”. En Argentine, l’art. 1488 du Code civil et commercial dispose que “Le droit à commission naît au moment de la conclusion du contrat avec le tiers et du paiement du prix au principal”.
En ce qui concerne iii) le préavis, les législations sont aussi divergentes. Au Brésil, la loi prévoit un préavis d’au moins “quatre-vingt-dix jours pour les contrats à durée indéterminée”, appartenant au juge dans le cas concret de se prononcer sur le délai qui serait raisonnable et les dommages-intérêts, au cas échéant (art. 720§ unique du Code civil). En Argentine, en revanche, le préavis est d’au moins “un mois pour chaque année de durée de contrat dans les contrats à durée indéterminée” (art. 1492 du Code civil et commercial). Toutefois, les parties peuvent convenir d’un délai de préavis supérieur sur le contrat. Ainsi, le droit argentin semble plus favorable sur ce point à l’agent commercial.
Il est intéressant de souligner qu’en France, selon l’art. L. 134-11 du Code de commerce, suivant les dispositions de la directive de 1986 (art.15§1), “la durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes”. Donc, plus proche de la prévision du droit brésilien.
À propos de la qualification d’agent commercial, à l’instar du droit français (art. L. 134-1 du Code de commerce), au Brésil, en Argentine et au Uruguay toute personne morale ou physique peut être également agent. En droit brésilien, toutefois, la Loi 4.886/1965, énumère certaines restrictions, ne pouvant pas être agent commercial: a) celui qui ne peut pas bénéficier de la qualité de commerçant; b) le failli non réhabilité ; c) ceux qui ont été reconnus coupables d'infractions pénales, telles que la malversation, le vol, le proxénétisme ou des délits passibles de la perte de la fonction publique ; d) celui dont le enregistrement commercial a été annulé à titre de pénalité.
Il est intéressant de souligner que même si la loi brésilienne prévoit l’obligatoriété de l’enregistrement de l’agent au Conseil Régional (art. 2 de la Loi 4.886/1965), il y a une discussion jurisprudentielle et doctrinale sur ce point. Certaines jurisprudences36 ayant décidé que le statut d’agent commercial n’est pas affecté par l’absence d’enregistrement, l’agent pouvant toujours réclamer son droit au préavis et à l’indemnisation.
Un autre aspect de divergence concerne iv) l’indemnisation de fin de contrat. En France le système d’indemnisation prévu à l’art.17, §2; b de la directive de 1986 est la règle. Ainsi, comme explique Hanine-Roussel, l’agent recevra “une indemnité de cessation de contrat de deux années de commissions calculées sur la base des trois dernières années”37.
Au Brésil, l’art. 27 de la Loi 4.886/1965 prévoit, dans le cas d’un contrat à durée indéterminée, une indemnisation minimale de 1/12 de la rémunération totale perçue pendant la période où l’agent a exercé ses activités. En revanche, dans le cas d’un contrat conclu pour une durée déterminée rompu avant le terme, l'indemnité correspondra au montant équivalent à la moyenne mensuelle des rémunérations perçues jusqu'à la date de la résiliation contractuelle, multipliée par la moitié des mois manquants pour le terme initialement prévu pour le contrat.
Toutefois, en cas de contrat à durée déterminée, son extinction due à l'expiration du terme ne donne pas lieu à indemnisation de l’agent38.
En contrepartie, l'art. 1497 du Code civil argentin établit un système d'indemnisation applicable dans le cas de contrats à durée déterminée ou indéterminée. Selon le droit argentin “A défaut d'accord, l'indemnité doit être établie par le juge et ne peut excéder le montant équivalent à un an de rémunération, net de charges”. Le plafond “d’un an de rémunération” étant calculé sur la base des rémunération annuelles perçues sur les derniers cinq années ou pendant la durée du contrat si celle-ci est inférieur à cinq ans. D’autre côté, la législation du Paraguay établi un système d’indemnisation basé sur la durée du contrat ;
Segundo Silva39, la jurisprudence n'est pas uniforme quant à savoir si, après l'expiration du délai naturel convenu entre les parties, le contrat de d'agence commerciale prend fin de plein droit sans obligation pour le principal d'indemniser.
Ainsi, certes, au cas concret d’autres éléments peuvent être analysés pour ajouter à cette indemnité, des dommages-intérêts et d’autres formes de réparation, par exemple, dans le cas d’un investissement récent de la part de l’agent pour exécuter le contrat. Toutefois, le droit français et le droit paraguayen semblent plus favorables en termes de forme de calcule du montant de l’indemnité. En particulier, le Paraguay la base de calcul est bien précise, ne se bordant pas à indiquer des montants minimaux ou maximaux, comme au Brésil et en Argentine.
Enfin, on peut aussi identifier des divergences en matière v) de conditions de forme et vi) d’exclusivité. Le contrat international d’agence commerciale doit être écrit en Argentine et au Paraguay. Toutefois, au Brésil, malgré le fait que la Loi 4.886/1965 prévoit certaines clauses qui sont indispensables au contrat (art.27), il n'y a pas expressément de condition de forme dans le Code civil. Ainsi, la jurisprudence tend à conclure qu'un contrat écrit n'est pas obligatoire40.
4 CONCLUSION
L’étude de la place de l’autonomie de la volonté en tant que règle de conflit de loi au sein de l’UE et du Mercosur permet de démontrer que ce principe n’est pas unanimement admis au Mercosur, notamment en matière de contrat d’agence commerciale. En effet, les résultats de la recherche démontrent une reconnaissance encore limitée de l'autonomie de la volonté dans les contrats internationaux d’agence commerciale au sein de l'UE et du Mercosur.
Au sein de l'UE, malgré le règlement Rome I, instituant l'autonomie de la volonté comme principe en matière de règles de conflits de lois, y compris en matière de contrats internationaux d’agence commerciale, la notion de loi de police ou d'ordre public peut exclure son application, nuançant, ainsi, sa reconnaissance.
En ce qui concerne les États membres du Mercosur analysés, les résultats indiquent une reconnaissance sensiblement limitée, à l'exception de l'Argentine, seul État du Mercosur signataire de la convention de La Haye de 1992 et où la loi applicable au contrat international d’agence commerciale est celle choisie par les parties.
En se penchant, ensuite, au droit matériel comparé entre le droit de l’UE, focalisant sur le droit français, et celui de certains pays du Mercosur, à savoir, le Brésil, l’Argentine et l’Uruguay, on a pu démontrer que les droits assurés à l'agent sont très divers.
En effet, malgré quelques tentatives d'uniformisation du droit matériel applicable, comme la Directive de 1986 au sein de l'UE, il existe toujours une indéniable hétérogénéité du droit en matière d’agence commerciale.
Cela nous permet de conclure, premièrement, qu’avancer vers un droit international plus uniforme en la matière est essentiel et, deuxièmement, qu’actuellement il vaut mieux inclure dans les contrats internationaux d’agence commerciale tant la clause de droit applicable que la clause attributive de juridiction.