SciELO - Scientific Electronic Library Online

 
 número37“Professores que nunca morrem”: Rogério Fernandes Ferreira (1929-2010), um pedagogo ao serviço do ensino superior de contabilidade índice de autoresíndice de assuntosPesquisa de artigos
Home Pagelista alfabética de periódicos  

Serviços Personalizados

Journal

Artigo

Indicadores

Links relacionados

  • Não possue artigos similaresSimilares em SciELO

Compartilhar


População e Sociedade

versão impressa ISSN 0873-1861versão On-line ISSN 2184-5263

População e Sociedade  no.37 Porto jun. 2022  Epub 02-Jan-2023

https://doi.org/10.52224/21845263/rev37a1 

Dossier Temático

L'adaptation des enseignants et l'enseignement du droit pendant la pandémie

Adaptation of teachers and teaching law during the pandemic

1Universidade Fernando Pessoa, Faculdade de Ciências Humanas e Sociais, Porto, Portugal.

2National University of Public Service, Department of International Law, Budapest, Hungary.

3Universidade Fernando Pessoa, Faculdade de Ciências Humanas e Sociais, Porto, Portugal.

4National University of Public Service, Department of International Law, Budapest, Hungary.


Résumé

La pandémie de SARS-CoV-2 a perturbé profondément la façon dont les enseignants universitaires travaillent, et la façon dont les étudiants étudient. L’enseignement en distanciel a apporté avec lui des solutions pédagogiques, mais l’expérience d’une année et demie a démontré que le e-learning a des caractéristiques propres, et il faut s’interroger sur ses apports. Cette interrogation est posée à propos de l’enseignement universitaire du droit, à travers l’analyse et les réflexions de deux enseignants et de deux étudiants, au sein de deux universités européennes (à Porto et à Budapest). L’article aborde les questions théoriques et pratiques posées : quelles sont les façons d’assurer une préparation pratique des étudiants à distance ? Les régimes hybrides sont-ils meilleurs que les régimes entièrement à distance ? Enfin, ce type d’enseignement peut-il faire perdre à l’enseignement juridique ses qualités intrinsèques, alors même qu’elle constitue l’un des piliers de la démocratie ?

Mots-clés: pandémie; enseignement; distanciel; université; droit.

Abstract

The SARS-CoV-2 pandemic has profoundly disrupted the way university teachers work, and the way students study. Distance learning has brought pedagogical solutions, but the experience of a year and a half has shown that e-learning has its own characteristics, and that its contribution should be questioned. This questioning is posed in relation to law teaching at university level, through the analysis and reflections of two teachers and two students, in two European universities (in Porto and in Budapest). The article addresses the theoretical and practical questions raised: what are the ways to ensure a practical preparation of students by distance? Are hybrid regimes better than full e-learning regimes? Finally, can this type of teaching cause the loss of the intrinsic qualities of law studies, even though legal education is one of the pillars of democracy?

Keywords: pandemic; education; distance learning; university; law.

Introduction

En décembre 2019, l'épidémie associée au nouveau coronavirus a impliqué une escalade en termes d'urgence sanitaire mondiale. La pandémie de Covid-19 a ravagé le monde depuis pendant près de de deux ans, avec un bilan de plus de cinq millions de morts (Johns Hopkins University & Medicine, 2021). Déclarée "urgence de santé publique de portée internationale" en janvier 2020 par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la nouvelle maladie, désignée COVID-19 le 11 février 2020, a été considérée comme constituant une pandémie mondiale le 11 mars 2020 (Crouzatier, 2020). L'un des principaux objectifs de la plupart des gouvernements du monde a dès lors été de contrôler ce virus hautement infectieux en imposant des mesures générales de confinement, des procédures de distanciation sociale, mais aussi la conversion de l'enseignement traditionnel, présentiel, en enseignement à distance.

Depuis le début de l'année 2020, souvent au milieu du semestre pour les universités de l'hémisphère nord, ou au début de l'année universitaire dans l'hémisphère sud, presque toutes les universités du monde sont passées de l'enseignement présentiel à l'enseignement distanciel. Un aspect de la pandémie qui n'est pas suffisamment analysé, à cet égard, est son impact sur l'adaptation des enseignants et des étudiants, et plus spécifiquement sur l'enseignement du droit. Cet article se concentre sur le cas européen (avec des comparaisons ponctuelles des institutions américaines), et résulte d'une collaboration entre deux universités partenaires Erasmus+: l'Université Fernando Pessoa, à Porto (Portugal), et la Ludovika - University of Public Service, située à Budapest (Hongrie).

Au sein de ces deux institutions, à des degrés divers, les enseignants et les étudiants des matières juridiques ont dû faire face à des problèmes communs que nous pouvons comparer à d'autres expériences internationales, aussi bien quant à leurs aspects généraux que sur des points spécifiques.

L'article résume les leçons apprises, les expériences vécues aussi, et les réflexions sur la manière d’améliorer les pratiques, en utilisant les regards croisés de la méthodologie de l’enseignement du droit (Rouvrière, 2014; Raimbault & Hecquard-Théron, 2018) et de de l’enseignement à distance destiné aux adultes (Jézégou, 2019). Les auteurs, qui sont des enseignants mais aussi des étudiants de Master, ne prétendent nullement connaître ou faire connaître tous les aspects propres à la prise de décision au niveau universitaire, mais bien plutôt partager des conclusions, des réactions à chaud ou plus réfléchies, ainsi que reproduire le produit des nombreuses discussions avec leurs collègues sur le sujet.

1. L'enseignement du droit

Le droit a été progressivement considéré comme un élément fondamental de l’éducation universitaire et de la formation de l'Homme dans la conception progressivement civique qui lui sera attribuée au sein des États modernes (Reulos, 1949). Peu après la Révolution française, dès le début du XIXe siècle, des cours de droit constitutionnel ont été intégrés dans les universités et sont devenus l'un des piliers de la culture politique et de la promotion de la démocratie (Mestre, 2017). Par ailleurs, l'essor du droit international à partir du début du XXe siècle a donné à l'enseignement du droit une véritable dimension mondiale, cimentée plus tard par la promotion des droits de l'homme qui a fait suite à la création de l’Organisation des Nations Unies en 1945 (Hárs, 2019). C’est aussi l’enseignement de nouvelles modalités du droit international, et notamment le droit européen, qui confèreront à l’enseignement du droit un rôle de vecteur d’union et de paix entre les peuples (Grossi, 2010).

Par conséquent, l'enseignement du droit est devenu une partie intégrante de la culture universitaire moderne, l’un des éléments clefs du terreau pour la démocratie, mais aussi, plus largement, un outils de compréhension globale en vue de promouvoir le dialogue, la compréhension entre les peuples, et l'harmonie sociale tant au plan local que plus globalement.

Le droit, en tant que discipline d'enseignement universitaire, a également un rôle fondamental à jouer dans la formation de l'une des branches de la souveraineté de l'État qu’est le pouvoir judiciaire, à travers la formation des magistrats et de leurs auxiliaires. Dans le même domaine, la formation des avocats garantit le droit à une procédure judiciaire respectueuse du principe du contradictoire. En France, comme dans d’autres pays de tradition romano-germanique, le droit a une dimension que l’on peut qualifier de propédeutique pour presque tous les autres domaines de la connaissance, en sciences sociales et humaines (Audren & Halperin, 2013). Il est enfin significatif de noter que les juristes sont presque toujours présents, voire obligatoires, au sein des entités sociales et politiques qui ont pour fonction de résoudre des problèmes administratifs, mais aussi des questions sociales ou éthiques (Byk, 1990).

Ce cadre, le caractère essentiel des enseignants et de l'enseignement du droit en vue d’une culture démocratique et civique, doit être souligné. Naturellement, la question se posera donc de savoir si le passage à l'enseignement à distance pendant la pandémie a été un facteur de perturbation. L’enjeu est de taille, si la qualité de l'éducation pouvaient souffrir de ces perturbations. Car ce serait, partant, la démocratie elle-même qui, compte tenu de l’éminente fonction sociale qu’incarne l'enseignement du droit, en subirait les conséquences à terme.

Toutefois, et avant de considérer les détails et de tirer des conclusions sur les évolutions pédagogiques liées au passage au distanciel, il convient d'abord de bien cerner ce qu'est l'enseignement distanciel.

2. L’enseignement distanciel

L'enseignement distanciel (aussi dénommé enseignement à distance, ou e-learning) n'est pas du tout une forme palliative de l'enseignement présentiel. Il a ses propres stratégies ou objectifs, ses propres méthodes, et même sa propre éthique. L'enseignement à distance peut, de façon simple ou même simpliste être décrit à travers ses contrastes avec l'enseignement présentiel. Alors que l'enseignement présentiel implique des cours ou des conférences dans les locaux de l'université en présence des étudiants, le distanciel diffère d’abord sur ce point. Les cours sont en effet dispensés dans un environnement numérique (généralement par le biais d'une plateforme d'enseignement à distance telle que Moodle, ou d’autres encore). Dans ce contexte, sont utilisés, si nécessaire, des enregistrements vidéo (qui peuvent être transmis de manière synchrone ou asynchrone), ou des webinaires organisés via Zoom, entre autres outils possibles. Pour l’essentiel, l'enseignement n’exige pas la présence physique des étudiants dans les locaux de l'université.

Ainsi, dans l'enseignement distanciel, il y a une séparation dans l'espace entre l'enseignant et l'étudiant. En revanche, il peut ne pas y avoir de séparation dans le temps entre eux, les cours pouvant avoir lieu aux heures habituelles. Cependant, la pédagogie liée au distanciel implique un haut degré de planification, et elle est ressentie comme étant exigeante, intense, notamment du fait que sa conception qui vise à encourager la participation, l'interaction entre l'apprenant et l'enseignant (Greenberg, 1998). Les différentes méthodes d'enseignement dépendront, par ailleurs, principalement des défis éventuels liés aux aspects techniques. Dans certains cas, les contextes et les conditions peuvent être défavorables, en raison des possibilités limitées de connexion à Internet (Khan, Niazi & Saif, 2020). Une bonne connexion à Internet: c'est là le premier des défis du distanciel, mais ce n’est nullement le seul.

Pendant le confinement imposé par la pandémie de COVID-19, plusieurs obstacles au travail des enseignants et à la qualité de l'enseignement à distance ont été observés: tout d'abord, le passage au distanciel a impliqué un engagement fort des professionnels spécialisés que sont les enseignants. Ils ont assuré une véritable mission de service public, en garantissant une continuité pédagogique et éducative. Cela a exigé d’eux un travail et une organisation supplémentaires.

En outre, il convient de noter que tous les enseignants n'étaient pas préparés à la transition vers le distanciel, ni prêts à tirer parti de l'enseignement à distance pour en faire bénéficier leurs étudiants. En effet, surtout au début de la pandémie, la situation vécue pouvait être considérée comme temporaire, et certains enseignants ont tout simplement négligé leurs enseignements. Par exemple, ceux qui avaient l'habitude de n’utiliser que le tableau ou des méthodes de travail traditionnelles (nombreux dans le domaine du droit), ou hostiles aux outils visuels tels que les images ou les présentations PowerPoint, n'ont pas toujours fait l’effort de les concevoir. Cela représente du travail!

Enfin, l'un des obstacles à un enseignement de qualité se situe du côté des étudiants. Pour ceux qui étaient vraiment motivés, l'apprentissage en distanciel a pu constituer un avantage, une occasion d'interagir en ligne, et aussi d'éviter des déplacements. En revanche, pour les étudiants pas ou peu motivés, le passage à l'enseignement distanciel a pu aggraver la situation, en les décourageant. À cela s'ajoutent des coûts supplémentaires pour les étudiants, mais aussi pour les enseignants, qui sont une partie souvent ignorée de l'enseignement distanciel (aquisition de matériel informatique, consommation électrique, etc.). En somme, l'enseignement distanciel a peut mettre à mal l’encadrement de certaines situations pédagogiques de base, une certaine façon de vivre l’enseignement ou, pire, certains des droits acquis, comme c’est le cas du droit au repos. N’est-ce pas Érasme lui-même qui est décrit comme un "ami de la modération, du repos et de l’étude" (Société des professeurs de philosophie, 1844, p. 252)? D’une façon plus générale, si l’enseignement en distanciel permet de conserver le "noyau dur", l’essentiel de l'enseignement, il ne saurait empêcher l’un des premières réactions observées, de façon répétée, chez les enseignants et les étudiants: la frustration.

3. Frustration et changement de perception

On a pu aisément observer qu'après presque deux ans d'apprentissage en distanciel (ou en régime hybride), les étudiants sont nettement plus anxieux, ou ont même des comportements quasiment anormaux, en raison de l'absence de vie sociale à l'université. Le fait de n'avoir aucun contact réel avec les professeurs et de ne pas pouvoir vivre, en général, l'expérience universitaire si appréciée par les générations précédentes, a frustré tout le monde, enseignants et étudiants compris. Cette dimension est plus particulièrement marquée dans l’enseignement du droit, où la dimension relationnelle, ainsi que la préparation à la pratique (à travers des exercices comme les simulations), est marquée.

Dans cet environnement radicalement différent, où les étudiants ont souvent moins confiance en eux-même pour agir, et même pour poser des questions ou demander de l'aide ou des conseils, l’accompagnement personnalisé doit être repensé si l'on veut préserver une logique de solidification des acquis et même préserver les chances de développement intellectuel (Dweck, 2006, p. 8). Ces observations peuvent sembler paradoxal, car pendant la pandémie, les possibilités d'activités complémentaires aux cours, les "webinars" ont été plus nombreuses que jamais. Mais cet engouement pour les "formations" online. Face à cette pléthore d’initiatives, les étudiants étaient de moins en moins inclinés à les utiliser. Les compétitions organisées par les enseignants des matières juridiques en sont un excellent exemple: la résolution de cas et les procédures simulées (les "moot". Cf. infra), qui sont normalement des événements passionnants sous leur forme présentielle, n'ont pas vraiment trouvé leur place "en ligne".

La lutte pour la motivation semblait être pour tous une bataille sans fin, et même une bataille perdue d'avance: dans un monde rivé autour d’Internet, l'interactivité réelle reste quelque chose d’insaisissable. Il est par exemple, impossible de convaincre les étudiants d'activer leur webcam, voire interdit de le faire, et encore moins facile de les convaincre de participer. Plus le groupe d’étudiants est important, plus la réticence à laisser les autres "entrer dans leur chambre" et partager un espace privé augmente. Malgré cela, la promotion de l'interactivité et de l'apprentissage bidirectionnel est devenue de plus en plus importante, et a aussi changé certaines perception - y compris celle de ce qu’est un bon enseignant ou un bon étudiant.

Il est intéressant de noter à cet égard que les perceptions de ce en quoi consisterait "enseignant idéal" ont peu à peu changé parmi les étudiants. La perfection d’une l'intervention orale, ou encore l’image associée à une certaine omnisciente de l’enseignant, tout cela a semblé laisser la place à un autre modèle. On attendrait maintenant de l’enseignante ou de l’enseignant qu'il soit surtout un être humain capable de faire des erreurs comme tout le monde, mais qu’elle ou qu’il s'exprime clairement, et surtout soit accessible aux étudiants. D'après les réactions des étudiants, ces qualités sont clairement devenues les caractéristiques les plus importantes (, 2021).. Si l'on traduit ces changements en termes pratiques, il n'est plus nécessaire qu'une présentation soit totalement élaborée, que le vocabulaire englobe une myriade d'expressions latines, ou que les vidéos enregistrées se déroulent sans accroc. S'il y a des fautes de frappe ici ou là, des mots simples ou quelques hoquets, non seulement cela semblera aux étudiants tout à fait acceptable, mais encore ce style sera généralement mieux accepté que le perfectionnisme.

Vu sous un angle légèrement différent, la cohésion du groupe est, durant la pandémie, devenue de plsu en plus faible, aussi bien pour les étudiants que pour les enseignants. Le fait de ne pas voir les autres en personne, de ne pas avoir de déjeuners ou de réunions de département, ou encore de ne pas partager des événements institutionnels ensemble, tout cela a un effet négatif sur la santé mentale et le moral des professionnels. Les réunions en présentiel et les "conversations de couloir" ponctuelles ont souvent été la bouée ou même la base du lien ténu qui a pu unir les enseignants, leur permettant d’apprendre l’existence de nouveaux projets de recherche, de recevoir des invitations, ou de prendre connaissance d'événements à venir (Jellum, 2021, pp. 71-72). Pour contrebalancer les choses, on ne peut pas dire que le distanciel n'ait eu que des inconvénients, car il est devenu franchement plus facile d'organiser des réunions (il n'y a pratiquement plus de temps de déplacement, dans le monde "en ligne"). Les permanences à distance sont en outre excellentes pour les étudiants comme pour les enseignants, car elles rendent inutile le fait de se rendre au bureau, et créent une plateforme d'interaction tendentiellement égale pour tous les étudiants. Il s'agit également d'une solution confortable pour les étudiants et les enseignants, de sorte que les réunions ou permanences en distanciel iront sans nul doute continuer dans la phase post-pandémie (Jellum, 2021, p. 71). Les permanences en distanciel et même l’orientation de travaux ou de thèses en distanciel sont particulièrement bénéfiques pour les étudiants à temps partiel, qui n’ont généralement accès aux enseignants qu'après leurs journées de travail ou durant le week-end; c’est aussi le cas pour un nombre croissant d'étudiants qui étudient ou effectuent des stages à l'étranger. En cela, l’enseignement distanciel a, au plan strictement processuel (et sans considérer pour l’instant les aspects de fond), facilité la continuité de l’enseignement pour tous les étudiants.

4. Le passage à l'enseignement distanciel

De nombreuses études ont déjà montré qu'il était possible d'enseigner le droit à distance, même si la préférence des enseignants et des meilleures facultés de droit dans le monde semble toujours aller vers un enseignement hybride plutôt que vers un enseignement totalement en régime distanciel, en particulier pour les niveaux plus avancés comme le doctorat (Lipton, 2020; Becker & Lloyd, 2018).

L'expérience des universités européennes, et des deux universités partenaires incluses dans cette étude (Université Fernando Pessoa et Ludovika - University of Public Service), est assez similaire à celle des universités américaines. La transition vers le distanciel a été, avant tout, une opération logistique. Les plateformes fonctionnaient déjà avant la pandémie et, souvent en moins d’une semaine, toute la logistique du passage à l'enseignement à distance a été prête. Dans certains cas la convertion des formations a pu prendre plus de temps. Cependant, en général, cette opération est assez rapide pour des formations en sciences humaines, y compris le droit. Le cas de la Harvard Law School, aux États-Unis, par exemple, est emblématique: elle a dû convertir plus de 250 cours au distanciel, et cela a été fait en seulement 12 jours (McArdle, 2020). En outre, le fait que de nombreux enseignants soient déjà au moins partiellement formés à l’enseignement à distance constitue un réel avantage.

En ce qui concerne l'enseignement du droit, l'expérience au sein des deux universités européennes incluses dans cette étude a montré que même s'il est apparemment possible, voire bénéfique, de passer à l’enseignement distanciel, ce n'est cependant pas toujours le cas. L'exemple des présentations de cours est significatif au regard de ce problème. En effet, la projection de textes et leur analyse pourraient, a priori, être considérées comme assurant une meilleure qualité de visualisation en distanciel. Cependant, cette appréciation ne tient pas compte du facteur humain, et notamment du langage corporel que le professeur utilise durant ses cours. Elle ne tient pas compte non plus de la spontanéité des interventions, qui sont un stimulant important pour l'intellect et pour le raisonnement juridique, ce dernier étant avant toute chose un raisonnement sur et avec l’humain, et non devant une machine. L’enseignement du droit, comme l’affirme Mekki (2020), doit obeir à "l’irréductible principle de présence". Selon lui, ”[e]n droit spécialement, tant l’art que la méthode font obstacle à une formation totalement à distance”.

On comprend donc que l’enseignement distanciel ait représenté un certain nombre de défis pédagogiques, et la plupart ont pu être surmontés avec plus ou moins de succès, en adaptant tant bien que mal les méthodologies d’enseignement. C'est notamment le cas du "moot" ou "moot of court". Cette méthode de simulation et de résolution d'un cas pratique devant une instance judiciaire (ou une cour internationale) est particulièrement prisée, notamment dans le monde anglo-saxon, mais aussi dans les d’universités de l’Europe continentale. Or, si cet exercice est théoriquement possible à organiser à distance, la spontanéité de celui-ci sur la toile n’a pas grand-chose à voir avec les relations habituelles ni les objectifs pédagogiques qu’il se propose. On peut redéfinir les objectifs ; mais on ne peut pas forcer la réalité. L’étudiant, et l’enseignant, sont devant une machine, pas devant un être en chair et en os. L’expression utilisée par Mekki (2020) s’applique parfaitement à cette situation, quand il defend que la "corporéité de l’enseignement, notamment en droit, est importante". Tout bien considéré, certains exercices juridiques risquent de perdre un élément important de leur vocation à l'enseignement, et cela est certainement valable pour d’autres matières en sciences humaines. En droit, comme dans d’autres domaines (action humanitaires, science politique, etc.), on enseigne aux étudiants à être réactifs, à savoir répondre du tac au tac, et à peser en fonction de la personne qui est en face l'opportunité et la pertinence d'un argument juridique. Il est tout aussi essentiel d’avoir une vision globale des choses, de bien appréhender la situation dans son ensemble. Comme l’on bien dit Raimbault et Galliano (2011), dans la pédagogie mise en peuvre dans l’enseignement du droit, il est essentiel d’"approcher le droit en situation".

Surtout, on a encore une fois l'impression que le côté humain, sensible, nuancé aussi que devrait véhiculer l'enseignement du droit, risque d’être en grande partie perdu. Il n’est pas suffisant de vouloir former de bons juristes, des experts techniques. Il est encore plus essentiel encore de former des personnes qui devraient avoir un sens élevé de la relation humaine. Le fait de rester des jours entiers derrière un ordinateur ne facilite sans doute nullement cet apprentissage, mais représente en revanche un coût non négligeable pour la santé physique et mentale (Barbot, Debon & Glikman, 2006).

Cependant, il convient de souligner tout de même certains points positifs de l’enseignement distanciel en matière d’enseignement juridique. Tout d'abord, et comme il a déjà été souligné, le distanciel a permis de multiplier les contacts, notamment entre professeurs. Ce qui était plus ponctuel dans le passé, comme les conférences à distance, est quasiment devenu la norme. En outre, pour un certain groupe d'étudiants, l’enseignement distanciel a été une véritable opportunité. C’est le cas des étudiants de niveaux plus avancé (masters ou doctorats), qui ont une plus grande maturité, et qui ont eu grâce au distanciel plus de temps pour se préparer. Selon une étude réalisée par Gallup et l'AccessLex Institute (Gallup, 2021) auprès de près de 2 000 doctorants des facultés de droit, la plupart des étudiants considèrent que le passage à l'enseignement à distance leur a donné plus de temps pour étudier et pour préparer leurs cours. Plus important encore, la transition vers le distanciel a augmenté (pour près de la moitié d'entre eux) le temps dont ils disposent pour s'occuper des membres de leur famille. L'étude souligne en effet "un avantage particulier des cours en ligne pour les parents et les soignants qui souhaitent obtenir un diplôme de droit" (Gallup, 2021, p. 4). Cela dit, si cette facette positive du distanciel est valable pour des étudiants plus mûrs et plus autonomes, il est important de se pencher sur les solutions qu’il offre pour un plus large public.

5. Méthodes et solutions adoptées

L'un des effets les plus évidents sur l'enseignement supérieur de la pandémie a été le passage au mode "en ligne". Ce phénomène a entraîné une diversification des outils d’apprentissage, avec l'abandon des tableaux noirs ou blancs, des présentations PowerPoint projetées, ou de l’utilisation d’énoncés imprimés, et cela au profit d’une panoplie de plateformes (Zoom, BBB, MSTeams, Google Classroom, Skype, etc.). La plateforme est d’ailleurs, en soit, un problème. En effet, l'absence d'une plateforme unifiée a parfois rendu la vie difficile aux étudiants, surtout si les enseignants décident d'utiliser des plateformes différentes. Elle a aussi rendu la tâche plus difficile aux enseignants travaillant dans plusieurs établissements utilisant des plateformes différentes.

Une autre tendance se dégage: les méthodes de gamification (Kahoot, Mentimeter, etc.), qui étaient auparavant utilisées avec parcimonie, sont devenues relativement courantes. Une conséquence possible de cette diffusion réside dans le danger réel de ces outils, qui peuvent paradoxalement provoquer l'ennui et la fatigue chez les étudiants. Sur une note plus positive, notons que les méthodes de l'enseignement présentiel ont été peu à peu modernisées, et les enseignants ont dû recourir à différents nouveaux outils (par exemple, le partage de vidéos au lieu de polycopiés), ainsi qu’organiser des activités de groupe en ligne, s'ils voulaient que leurs cours soient interactifs. Cependant, même avec ces méthodes créatives, les enseignants n'ont pas pu conserver le contrôle qu'ils avaient auparavant sur l'environnement de leur enseignement, car dans de nombreux cas les étudiants refusaient d'activer leurs webcams, ce qui est une question recurrente au sein des universités étudiées. Si l’enseignant était la seule personne visible, le cours pouvait ressembler à un monologue, et le professeur avoir l'impression de parler à un miroir. Contrairement à l'enseignement présentiel, où l'on peut sentir l'ambiance de la salle et déduire en un instant si l'on est sur la bonne voie (notamment à travers le contact visuel), l'espace "en ligne" n'offre que des possibilités très limitées.

Cependant, il faut bien reconnaitre ici l’utilité d’un outil: il s’agit du projet de bibliothèque audiovisuelle de l’Organizastion des Nations Unies (ONU) (United Nations Audiovisual Library Project), l'un des meilleurs outils du Programme d'assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international (AGNU, 2020). Le site web et surtout la série de conférences qui y sont disponibles peuvent être utilisés, dans le cas où l’université aurait décidé de ne pas enregistrer les sessions de l’enseignant, ou si des matériaux supplémentaires sont nécessaires pour présenter une analyse différente de ce qui a été dit en cours. En outre, les spécialistes les plus renommés du droit international présentent leur sujet dans les six langues officielles de l'ONU1, même si un sujet n'est détaillé que dans l'une des langues, et n'est pas forcément encore traduit dans les autres.

Également dans le domaine des outils utiles, la plupart des plateformes disposent d'une fonction de salles séparées. Cette fonction s’avère utile pour les travaux de groupe, pour traiter des études de cas, pour organiser des débats, et aussi pour discuter des deux côtés d'une question juridique. Les salles séparées permettent de rompre partiellement la monotonie, et sont perçues assez favorablement par les étudiants. Elles sont aussi un excellent vecteur pour stimuler la réflexion (Jellum, 2021, p. 70). Elles servent à donner aux étudiants un moyen d'exprimer leurs opinions, mais permettent en outre de vérifier qui est réellement présent lorsque les webcams sont inactives, lors des cours. Le fait de ne pas avoir à activer les webcams, dans ces salles, ainsi que la possibilité d'utiliser des pseudonymes, peut également encourager les étudiants plus introvertis ou timides à participer.

Pour la majorité des étudiants (voir également la section suivante, infra), le fait de suivre des cours purement en distanciel a constitué un changement de rythme bienvenu, mais cela est surtout vrai pour les étudiants à temps partiel. Par ailleurs, une récente étude montre que la satisfaction des étudiants en droit ayant commencé leurs études après le début de la pandémie est plus élevée que celle des édudiants qui ont vécu le changement de régime en cours d’études (Ward, 2021). La méthode consistant à diviser les sessions en parties théoriques et pratiques peu aussi avoir des effets bénéfiques, de façon à canaliser ou diriger de façon plus claire le travail des étudiants. Par ailleurs, en cas d'apprentissage hybride, le fait de séparer le groupe d’étudiants en deux (présentiel et distanciel), puis à intervertir les rôles afin de maintenir les règles de distanciation sociale durant les cours, est une méthode qui a fait ses preuves. L'apprentissage hybride comporte toutefois un bémol: il peut avoir un effet négatif sur certains étudiants internationaux, et créer des inégalités en raison des restrictions imposées à ceux qui doivent voyager, et de la nécessité qu’ils ont de se conformer aux règles de quarantaine (Sandoval et al., 2021, p. 438).

En matière d'évaluation, le distanciel oblige à une diversification des stratégies. Les examens oraux en distanciel ont sans conteste créé et créeront des complications, dans la plupart des cas, car certaines situations illégales, de tricherie, sont difficiles à éliminer. Il existe toujours un grand nombre de voies permettant de contourner les règles. Pour de grands groupes d'étudiants, les tests basés sur des bases de données et des analyses complexes peuvent largement simplifier les examens. Un bon exercice, exigeant une certaine complexité, pourrait inclure par exemple des questions plus courtes faisant appel à un raisonnement appliqué, comme des affirmations vraies ou fausses qui peuvent être ordonnées de plusieurs façons afin que la réponse ne puisse pas être copiée par d’autres. Il est également utile d'ajouter des exercices de résolution de cas fictifs basés sur des modèles et des cas qui ont été traités lors des cours. Lorsque ce type d’exercice est associé à des dissertations ou à des évaluations individuelles, les processus de réflexion et les recherches peuvent quant à eux être évalués de manière personnalisée. Cela dit, les exercices complexes prennent vraiment beaucoup de temps à être conçus et à être corrigés. Là encore, le distanciel représente une charge supplémentaire pour les enseignants. Il est imporant que les responsables des universités ou des facultés en aient la pleine conscience, et ce raisonnement vaut aussi pour l’investissement que les étudiants feront dans ce type d’études, où l’abandon est plus fréquent qu’ailleurs (Papi & Sauvé, 2021).

6. Le point de vue des étudiants

Pour les étudiants, des changements radicaux se sont produits durant le passage au distanciel après le début de la pandémie. Ceux-ci ont remis en question la définition de la "normalité". Les études réalisées auprès des étudiants montrent que 30% d’entre eux souffrent de troubles psychologiques, et ce plus d’un an après le début de la pandémie (OVE, 2021). La fermeture des établissements représenta un choc dont les conséquences sont encore ressenties aujourd’hui. Pour beaucoup, la nouvelle forme de pédagogie en distanciel, souvent improvisée, a été un élément de forte perturbation. Qui plus est, pour de nombreux étudiants étrangers qui fréquentent de nos jours les campus européens, le passage à l'apprentissage en ligne et le double isolement qu’il representait (de la famille et de la communauté universitaire) n'était pas le cadre le plus idéal. Pour les étudiants, étudier le droit (et notamment le droit international) s’est révélé parfois plus que frustrant. Même si les enseignements ont su, parfois (pas toujours), s’adapter, l'apprentissage en ligne s'est avéré une entrave à un véritable débat, sur les cas pratiques notamment. Des salles de réunion virtuelles étaient disponibles, et ont été utilisées, permettant d'augmenter légèrement les possibilités de discussions, mais le contact et l'apprentissage avec et à partir des autres étudiants faisaient toujours autant défaut. En outre, et en plus d'entraver la discussion, l'apprentissage en ligne permettait diverses distractions. Certains étudiants ont dit leur impression d'être en train d’écouter un podcast plutôt que de recevoir un enseignement. L’absence de réaction de l’enseignant, l’absence possibilité d’adaptation à l’auditoire, est patente dans cette observation.

À tous ces points négatifs s'ajoutent les difficultés liées à une pandémie sans précédent. De nombreux étudiants pleuraient la perte de leurs proches, ou le fait qu’ils étaient malades, et ils souffraient de l'isolement ou subissaient d'autres formes de stress liés à la pandémie. Ce stress a également eu un impact fort sur les étudiants, notamment du fait qu’il était plus difficile de se concentrer lorsque tant de choses se passaient dans le monde ou dans leurs vies personnelles. Toutefois, cela a appris à beaucoup d’étudiants à être plus endurants, flexibles, et capables de s’adapter aux circonstances. La configuration de l'apprentissage en distanciel a pu transmettre un plus grand sens des responsabilités aux étudiants, et un sens de la discipline personnelle. Mais cela aura été le cas seulement de ceux qui ont su profiter de la gestion de leur temps, qu’exigeait un travail fait dans une plus grande solitude. Lorsque des enregistrements ou des matériaux étaient disponibles, les étudiants pouvaient aussi les consulter à tout moment, étudier à leur propre rythme, et revoir les parties mal comprises. Mais cela aussi demande une discipline, et donc un stress accru.

En somme, pour les étudiants, et malgré la pression ou même de l’angoisse qui a résulté de la pandémie elle-même, l'enseignement distanciel n’a pas été considéré comme totalement inutile. Malgré ses inconvénients, il a permis de participer aux cours dans le confort de leur habitation et d’éviter les contagions, ce qui est un aspect non négligeable. Ce bilan, fait auprès des étudiants, requière de tirer des leçons de cette période d’expériences pédagogiques.

7. Quelques leçons

En ce qui concerne les leçons apprises, il faut prendre en compte quelques questions importantes, qui sont un préalable avant de passer à un enseignement entièrement en distanciel. En se mettant à la place des étudiants, et avant de passer au distanciel, il faut se poser les questions suivantes: les étudiants connaissent-ils les plateformes utilisées par l'université et savent-ils s’en servir? L'accès à distance est-il réellement accessible à tous, y compris le know-how nécessaire afin d’utiliser correctement un ordinateur? Que se passe-t-il lorsque la connexion Internet est faible ou s'arrête pendant les cours (pour les enseignants) ou pendant les examens (pour les étudiants)? Les étudiants peuvent-ils accéder à tout le matériel en ligne ou est-il nécessaire de préparer d'autres sources, ou de numériser le matériel (Satayanurug, 2020)? Il incombe aux organes institutionnels ou aux décideurs des institutions respectives de trouver une réponse satisfaisante à ces questions, avant de franchir le pas si important du passage au distanciel.

Nous concentrerons ici l’analyse et ces réflexions sur les enseignants, sans pour autant négliger les problématiques auxquelles sont confrontés les étudiants. À propos des étudiants, on a déjà pu souligner l'absence d'interaction avec leurs pairs, qui rend l'enseignement distanciel profondément différent de l'enseignement présentiel. Cette observation, celle de la profonde différence avec l’apprentissage en présentiel, oblige à repenser l’enseignement, non seulement comme un apprentissage en distanciel, mais aussi comme un apprentissage asynchrone (Kohn, 2020, p. 9). Même si les enseignants des universités européennes ont répondu positivement, en général, aux changements qu'implique le passage au distanciel, des questions se posent pourtant encore, et elles sont nombreuses.

Les matériaux produits par les enseignants par exemples, sont-ils accompagnés par les responsables des formations? (e.g. téléchargement hebdomadaire de tous les cours; enregistrements vidéo). Les délégués à la protection des données sont-ils mis au fait des questions de protection de la vie privée? Les commissions d’éthique se prononcent-t-elles sur les questions sous-jascentes à l'intrusion quasiment inévitable dans la vie privée, notamment en ce qui concerne les enseignants?

En outre, il convient de souligner la nécessité d’un accompagnement psychologique digne de ce nom, car il existe une dimension émotionnelle de la transition vers l’enseignement distanciel. Il reste beaucoup à faire pour comprendre si les enseignants, ainsi que les étudiants, peuvent maintenir un niveau de bien-être adéquat pendant leurs études en distanciel (Jones, 2020).

Surtout, le passage au distanciel ne doit pas faire oublier le côté humain du métier d'enseignant. Plusieurs questions se posent, à cet égard.

D’abord, il y a eu et il y a avec l’enseignement distanciel une certaine dilution des barrières entre la vie professionnelle et la vie privée. La qualité de l'enseignement peut en souffrir. Il est impossible aux enseignants, dans le contexte de leur logement, de supprimer tous les bruits (le chien qui aboie; les véhicules qui passent avec leurs sirènes; ou les enfants qui jouent ou crient). Cela nuit souvent à la capacité de concentration des enseignants et des étudiants, alors même l'enseignement du droit exige une concentration maximale.

Ensuite, certaines questions se posent quant à la neutralité éthique des espaces d’enseignement. L'université représente un lieu ayant pour vocation exclusive le partage des savoirs, et c’est un espace également régi par des principes de neutralité et d'impartialité importants en tant que valeurs éthiques (et pédagogiques). Exiger que le foyer des enseignants présente les mêmes caractéristiques serait excessif. Il y a donc un problème, réel ou tout au moins potentiel. Car si le bon sens veut que les enseignants assurent leurs cours à la maison dans une atmosphère neutre, rien ne les y oblige. Ils peuvent faire passer des messages qui ne sont pas conformes à une certaine éthique professionnelle qui implique de ne pas prendre parti de façon trop marquée, et à conserver un espace entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle - même si la neutralité est selon certains auteurs, en pratique, impossible sur le terrain de l’éducation (Kleinig, 2007). Une chose est au moins certaine: si l’espace universitaire peut faciliter l’existence d’un espace neutre, cela ne sera pas forcément le cas de l’espace privé de l’enseignant.

Enfin, pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, les enseignants sont vivent l’enseignement distanciel en étant soumis à un stress tout à fait extraordinaire. Cela a été particulièrement vrai durant les premières semaines de la pandémie. Comme le dit le professeur Crespo (de la faculté de droit de l'Université de Harvard), en partageant son expérience: "Je me suis concentré pour trouver un moyen de gérer toutes les émotions difficiles que mes étudiants - et franchement, moi aussi - ressentaient, et l'incertitude quotidienne de ne pas savoir ce que tout cela signifiait" (McArdle, 2020). Il faut bien le reconnaitre: de nombreux enseignants ont choisi, durant la pandémie, d'abandonner le combat, et on les comprend. C’est d’ailleurs un aspect visible dans l'augmentation des départs à la retraite anticipée, et dans l'augmentation des demandes de congé sans solde. Cela a également été un facteur préjudiciable pour tout le monde, car ceux qui ont abandonné le terrain n’ont fait que passer le fardeau à d’autres. Quelle voie suivre pour éviter cela dans le futur?

8. La voie à suivre

Une chose est sûre: la pandémie nous a tous obligé à nous s'adapter. Le corps enseignant, les étudiants et les institutions auront sans doute, dans le futur, de meilleures chances de survivre à cette étape décisive, et seront finalement mieux à même de s'adapter rapidement, si d’aventure d’autres épidémies surgissent.

Par ailleurs, et sur un plan strictement pédagogique, nous y trompons pas: la concurrence est devenue encore plus féroce qu'auparavant. Les universités et autres établissements d'enseignement supérieur qui se sont rapidement adaptés ont pris l'avantage sur les établissements plus conservateurs ou traditionalistes. Afin de fournir quelques conseils pour s'orienter dans ce nouvel environnement, les recommandations de Guilfoyle et Urban sont résumées ici, avec certaines idées de notre propre source.

La première règle est de toujours rendre les choses le plus simple possible. Utiliser des plateformes unifiées qui offrent un accès facile aux étudiants et aux enseignants est essentiel, en rappelant les adresses électroniques et les moyens de contacter les personnes concernées, tout en permettant l'intégration de ressources et de plateformes externes. Il est normal que certaines attentes soient revues à la baisse. Le moral, notamment des enseignants les plus "traditionalistes" est susceptible de baisser en raison de l'environnement changeant et des niveaux de stress élevés. À ce stade, il convient de se demander quel est le minimum que les enseignants en droit doivent transmettre aux étudiants, et quelles sont les compétences matérielles et fondamentales que ces derniers doivent acquérir? (Guilfoyle, 2020). Doit-on enseigner comment résoudre un cas pratique? Quelles bases de données utiliser pour rédiger un travail? Comment analyser les traités internationaux, en droit international? Avec les bases et les ressources transmises, et les moyens supplémentaires offerts pour contacter l’enseignant, l'équilibre entre l'enseignement présentiel et l'enseignement distanciel pourrait bien pencher en faveur de ce dernier. D'un point de vue méthodologique, l'utilisation de références de lectures sera toujours nécessaire et recommandée, et préférable aux seules ressources en ligne, qui sont surtout prévues dans un souci de facilité d’accès. Internet et ses ressources sont, en grande partie, des eaux dangereuses, on n’insistera jamais assez sur ce point. L’enseignant a, plus que jamais avec l’enseignement distanciel, la responsabilité d'expliquer ce qui peut et ce qui ne peut pas être utilisé (Wikipédia c. UNTC/Recueil des Traités as Nations Unies en ligne, par exemple). Les matériaux enregistrés peuvent également constituer un atout important. Qu'il s'agisse de matériaux audio et vidéo créés par les enseignants eux-mêmes ou de l'utilisation de versions préenregistrées par d'autres (bibliothèque audiovisuelle de l'ONU ou clips YouTube), l'important est de présenter aux étudiants un large choix de ressources fiables.

En ce qui concerne les aspects organisationnels, la réflexion doit être faite en profondeur sur ce qui sera le mieux pour atteindre l'objectif d’un cours, entre un enseignement synchrone (classes virtuelles) ou asynchrone (vidéo ou audio préenregistrés accompagnés de matériel de lecture), ou une combinaison des deux (Guilfoyle, 2020). N'oublions pas, par ailleurs, qu'au lieu d'une séance normale de 90 minutes, les étudiants ne devraient pas avoir à rester assis chez eux à écouter pendant des heures, à suivre ensuite un cours en ligne et à avoir enfin beaucoup à lire sur le sujet. Bombarder les étudiants avec un trop large éventail de travaux et de ressources sera sans aucun doute contre-productif. Les sessions en ligne trop longues sont à éviter à tout prix, le maximum étant 60 minutes (Université de Montréal, Centre de pédagogie universitaire, s/d).

En revanche, le concept de classe inversée peut quant à lui être utilisé plus efficacement, et plus souvent maintenant qu'auparavant. L'idée sous-jascente dans la méthode de la classe inversée est de permettre un apprentissage dans lequel les étudiants doivent acquérir par eux-mêmes des connaissances préalables sur certaines questions. Ensuite, l’enseignant synthétise et structure les connaissances, tout en accordant suffisamment de temps pour répondre aux questions (Urban, 2020, p. 226). Dans un environnement distanciel, cela réduit la monotonie en impliquant directement les étudiants dans l’apprentissage, et cela peut donner lieu à des discussions plus approfondies et détaillées sur un sujet.

En ce qui concerne l'évaluation, il est utile d'éviter de s'appuyer sur des travaux purement écrits, car les étudiants pourraient être submergés par des travaux obligatoires de nature similaires (Guilfoyle, 2020). Afin d'éviter un certain épuisement des étudiants (ainsi que celui des enseignants, après avoir corrigé et fourni une correction sur tous ces travaux écrits), il pourrait être judicieux de se coordonner entre collègues enseignants dans la même matière ou la même formation. Par exemple, il serait facile de programmer une séance de brainstorming sur la façon dont les autres enseignants veulent gérer l'évaluation (en utilisant des présentations, des tests en ligne, des tests plus long suivant le rythme des étudiants, des débats, des travaux écrits, des recherches en ligne, etc.). L'objectif est d'avoir un mélange varié qui convient à l'enseignant, et qui ne crée pas un environnement répétitif pour l'étudiant. Lorsque l'évaluation est terminée, il est essentiel d'intégrer le feedback reçu de la part des étudiants, puis de partager et d'analyser ce feedback avec les autres collègues enseignants. Cela peut contribuer à améliorer la qualité de l'enseignement, à accroître la satisfaction des étudiants à long terme, et à guider l'institution en soulignant les méthodes de travail qui fonctionnent et celles qui doivent être abandonnées.

Si nous voulons conserver les avantages de la technologie, à terme, nous devons accepter le fait que l'interruption forcée de l'enseignement présentiel avec la pandémie peut aussi être un avantage que nous avions ignoré (Urban, 2020, p. 227). Disposer d'une plateforme en ligne complète où l’essentiel est disponible devrait être possible, depuis les tâches quotidiennes jusqu’à la mise à disposition d'un forum de discussion, en passant par le stockage de lectures et de liens recommandés. D'un autre côté, il existe de la part des étudiants un désir palpable de revenir aux méthodes d'enseignement traditionnelles. Suivre un cours sans slides, sans prézis et sans quiz Kahoot, juste avec l’enseignant et le dialogue pur - voilà qui peut être une expérience rafraîchissante! Au final, enseigner consiste non pas à concevoir de magnifiques outils à mettre en ligne, mais c’est surtout une question de connaissances et d'approche systématique de l’enseignant, de décryptage de l'auditoire, et d'adaptation de la méthodologie en conséquence. L'utilisation de méthodes d'enseignement "à l'ancienne" ou "rétro" peuvent elles aussi rompre avec la monotonie, offrir des alternatives, et faire sortir les étudiants et les enseignants de leur zone de confort, en apprenant à apprécier les événements naturels, en présentiel, au milieu d’un monde saturé de présentations "en ligne" sans fin.

Les deux dernières années ont été différentes, difficiles et stressantes pour tous, autant pour les étudiants que pour les enseignants. Chercher constamment des moyens de s'adapter et être assez humble pour remarquer ses erreurs, demander de l'aide et s'améliorer, sera l'un des principaux moyens de progresser, non seulement en termes d'enseignement du droit, mais aussi au niveau individuel.

Conclusions

La pandémie de SARS-CoV-2 a frappé le monde entier et s'est propagée très rapidement. Elle est entrée dans notre univers pour rester pendant plusieurs années. Son arrivée a permis de constater que de nombreux États et décideurs institutionnels avaient été lents à réagir, en général comme au niveau de l'éducation, et en particulier de l'enseignement supérieur.

Si les décideurs vacillent dans leur prise de décision, une incertitude importante s’associe à ce comportement dans l'ensemble du système, surtout si les décisions nécessaires ne sont pas prises à temps. Les enseignants ont quant à eux été souvent contraints de créer des plans d'urgence pour administrer leurs enseignements et gérer leurs semestres en présentiel, en ligne, et en régime hybride, tandis que les étudiants devaient garder ces trois possibilités à l'esprit s'ils voulaient réussir à suivre tous leurs cours.

Il y a eu des incohérences non seulement au niveau institutionnel mais aussi au niveau personnel, les enseignants ayant parfois recours à la modification des critères d’évaluation au fur et à mesure que le semestre avançait, ignorant parfois les arrangements précédents. Tout aussi grave, le fossé entre les générations d'enseignants s’est creusé, les plus jeunes étant généralement plus ouverts au changement et leurs collègues plus âgés ayant parfois plus de mal à s'adapter. Tous les éléments susmentionnés ont abouti à un résultat unique, très visible, et qui doit encore une fois être souligné: le stress à tous les niveaux et pour tous les intervenants, mais aussi une certaine déshumanisation de l’enseignement qui est particulièrement négative en ce qui concerne l’enseignement du droit.

Grâce aux efforts de tous, enseignants comme étudiants, l'enseignement du droit n'a pas subi de pertes irréversibles, même si le côté humain de l'enseignement a sans aucun doute l’un de ses traits les plus caractéristiques. Simultanément, cependant, de nouvelles voies ont été explorées. On peut en conclure que ces voies ont trois caractéristiques: d’abord, certaines de ces voies sont étroites (la technologie n'est pas disponible partout, elle n’est pas accessible à tous, et elle consomme aussi de l'énergie - un produit de plus en plus précieux aujourd’hui); ensuite, certaines de ces voies sont dangereuses (notamment les évaluations en ligne); enfin, il existe des voies qui ne mènent nulle part (comme la confiance totale dans les ressources en ligne).

Pour conclure, il est essentiel de noter combien il est plus difficile, voire impossible, d’être réactif et de s’adapter à un auditoire, dans l’enseignement en distanciel. Tous les efforts faits pour adapter les techniques pédagogiques au distanciel apparaissent, le plus souvent, comme des palliatifs de l’enseignement réalisé en chair et en os. Néanmoins, cela vaudra la peine de poursuivre le chemin. L’adaptation des enseignants et des étudiants en droit à l’enseignement à distance sera à la fois un défi et une opportunité et, comme tel, passera par la recherche d’un équilibre, sans apriorismes, mais aussi par l’identification pleine et consciente des écueils possibles. Rechercher avant tout l'équilibre, comme cette balance symbole de la justice et des juristes. Après tout, c'est précisément dans cet esprit d'équilibre que devront être formés les juristes de demain.

Bibliographie

AGNU. (Assemblée générale des Nations Unies). (2020). Programme d’assistance des Nations Unies aux fins de l’enseignement, de l’étude, de la diffusion et d’une compréhension plus large du droit international - Rapport du Secrétaire général. A/75/389. 13.10.2020. Nations Unies Bibliothèque Numérique. Disponible sur https://digitallibrary.un.org/record/3887491?ln=frLinks ]

Audren, F., Halpérin, J. L. (2013). La culture juridique française. Entre mythes et réalités XIXe-XXe siècles. Paris: CNRS éditions. [ Links ]

Barbot, M. J., Debon, C. & Glickman, V. (2006). Pédagogie et numérique, contradictions, convergences. Éducation permanente, 169, 5-192. [ Links ]

Becker, A., Lloyd, C. (2018) An Invitation to Explore Online Legal Education and Strategically Realign Legal Education.Mitchell Hamline Law Review, 44(1). Disponible sur https://open.mitchellhamline.edu/mhlr/vol44/iss1/6Links ]

Byk, C. (1990). Les instances d'éthique en droit compare. Cahiers internationaux de Sociologie, 88, 215-230. [ Links ]

Crouzatier, J. M. (2020). La gestion internationale des pandémies: le cas du COVID-19. Revue générale de droit médical, 75, 75-95. [ Links ]

Dweck, C. S. (2006). Mindset: The New Psychology of Success. New York: Random House. [ Links ]

Gallup. (2021). Law School in a Pandemic: Student Perspectives on Distance Learning and Lessons for the Future. Gallup & AccessLex Institute. Disponible sur https://www.accesslex.org/law-school-in-a-pandemicLinks ]

Greenberg, G. (1998). Distance education technologies: Best practices for K-12 settings.IEEE Technology and Society Magazine, 17(4), 36-40. [ Links ]

Grossi, P. (2010). A History of European Law(trad. Laurence Hooper). New York: Wiley-Blackwell. [ Links ]

Guiffrida, D. (2021). The Good Enough Professor. Inside Higher Ed, 7 July. Disponible sur https://www.insidehighered.com/advice/2021/07/07/faculty-member-considers-why-different-professors-succeeded-or-struggled-duringLinks ]

Guilfoyle, D. (2020). COVID-19 Symposium: Teaching Public International Law in the Time of Coronavirus-Migrating Online. Disponible sur http://opiniojuris.org/2020/04/02/covid-19-symposium-teaching-public-international-law-in-the-time-of-coronavirus-migrating-online/Links ]

Hárs, A. (2019). The United Nations, in Z. Fejes, M. Sulyok, & A. Szalai (coord.). Interstate relations (pp. 103-130). Szeged, Magyarország: Iurisperitus Kiadó. [ Links ]

Jellum, L. D. (2021). Did the Pandemic Change Legal Education for Better or Worse?. United States Attorneys' Bulletin, 69(4), 67-76. [ Links ]

Jézégou, A. (dir.). (2019). Traité de la e-formation des adultes. Louvain-la-Neuve: De Boeck Supérieur. [ Links ]

Johns Hopkins University & Medicine. (2021). Mortality Analyses. Coronavirus Resources Centre. Disponible sur https://www.coronavirus.jhu.edu/data/mortalityLinks ]

Jones, E. (2020). Connecting Legal Education: Wellbeing of online distance learning students. Association of Law Teachers. Disponible sur http://lawteacher.ac.uk/connecting-legal-education/connecting-legal-education-wellbeing-of-online-distance-learning-students/Links ]

Khan, A. A., Niazi, S., & Saif, S. K. (2020). Universities unprepared for switch to remote learning. University World News. 26 March 2020. Disponible sur https://www.universityworldnews.com/post.php?story=20200326141547229Links ]

Kleinig, J. (2007). Principles of Neutrality in Education. Educational Philosophy and Theory, 8(2), 1-16. [ Links ]

Kohn, N. A. (2020). Online Learning and The Future of Legal Education: Symposium Introduction. Syracuse Law Review. 70. Disponible sur https://lawreview.syr.edu/wp-content/uploads/2020/07/1-11.pdfLinks ]

Lipton, J. D. (2020). Distance Legal Education: Lessons from the “Virtual” Classroom. IDEA: The IP Law Review. 60. Disponible sur https://www.ssrn.com/abstract=3491427Links ]

McArdle, E. (2020). Distance Learning Up Close: Teaching and learning in the first months of the pandemic. Harvard Law Today. July 23. Disponible sur https://today.law.harvard.edu/feature/distance-learning-up-close/Links ]

Mekki, M. (2020). Digital learning dans l’enseignement du droit: Prenons nos distances ! Cercle K2. Disponible sur https://cercle-k2.fr/etudes/digital-learning-dans-l-enseignement-du-droit-prenons-nos-distances-369Links ]

Mestre, J. L. (2017). L’évolution de l’enseignement du droit constitutionnel à la Faculté de Droit d’Aix.Les Cahiers Portalis, 4(1), 113-119. [ Links ]

OVE (Observatoire de la vie étudiante). (2021). Une année seuls ensemble. Enquête sur les effets de la crise sanitaire sur l'année universitaire 2020-2021. OVE INFOS. 45, Novembro. Disponible sur http://www.ove-national.education.fr/wp-content/uploads/2021/11/OVE-INFOS-45-Une-annee-seuls-ensemble-.pdfLinks ]

Papi, C., & Sauvé, L. (dir.). (2021). Persévérance et abandon en formation à distance. Québec: Presses de l’Université de Québec. [ Links ]

Raimbault, P., & Galliano, L. (2018). Synthèse. La pedagogie en droit : pour qui et pour quoi faire ?, in P. Raimbault & M. Hecquard-Théron (dir.), La pédagogie au service du droit. (pp. 421-431). Toulouse: Presses de l’Université Toulouse 1 Capitole. [ Links ]

Raimbault, P., & Hecquard-Théron, M. (dir.).(2018). La pédagogie au service du droit. Toulouse: Presses de l’Université Toulouse 1 Capitole . [ Links ]

Reulos, M. (1949). L'humanisme des juristes du XVIe siècle, Actes du Congrès de l'Association Guillaume Budé: Grenoble, 21-25 septembre 1948. Paris: Les Belles-Lettres, 301-304. [ Links ]

Rouvière, F. (2014). Quelles méthodes pour l’enseignement du Droit à l’aube du 21èmesiècle ?.Les Cahiers Portalis, 2014/1, 1, 43-50. Disponible sur https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-portalis-2014-1-page-43.htmLinks ]

Sandoval, C. J. K., Cain, P. A., Diamond, S. F., Hammond, A. S., Love, Jean. C., Smith, S. E., & Nabipour, S. (2021). Legal Education during the COVID-19 Pandemic: Put Health, Safety and Equity First. Santa Clara Law Review. 61(2), 367-466. [ Links ]

Satayanurug, P. (2020). Adaptability with Inclusivity: Teaching International Law during the Pandemic. AfronomicsLaw. Disponible sur https://www.afronomicslaw.org/2020/09/29/adaptability-with-inclusivity-teaching-international-law-during-the-pandemicLinks ]

Société des professeurs de philosophie. (1844). Dictionnaire des sciences philosophiques. Tome Premier. Paris: Hachette. [ Links ]

Université de Montréal, Centre de pédagogie universitaire. (s/d). Prestation de cours. Disponible sur https://cpu.umontreal.ca/enseignement/prestation-de-cours/Links ]

Urban, M. (2020). Five Lessons Learned from the Current COVID-19 Crisis at Charles University in Prague, Czech Republic. Asian Journal of Legal Education, 7(2), 224-227. [ Links ]

Ward, S. F. (2021). What do law students think of remote learning during the pandemic? A new survey sheds Light, ABA Journal. Disponible sur https://www.abajournal.com/news/article/what-do-law-students-think-of-remote-learning-during-the-pandemicLinks ]

1L’anglais, l’arabe, l’espagnol, le français, le mandarin et le russe

Received: April 14, 2022; Accepted: June 04, 2022

Correspondência: João Casqueira Cardoso E-mail: jcasq@ufp.edu.pt

Creative Commons License This is an open-access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License